Auditionné par la commission des affaires économiques du Sénat, le 18 octobre 2023, Philippe Camburet, président de la Fnab (Fédération nationale de l’agriculture biologique), s’est exprimé sur la situation des producteurs alors qu’un nouveau programme ambition bio est attendu pour le début de 2024.

Maintien des 18 % de SAU pour 2027

Ce programme ambition bio verra probablement entériné l’objectif de 18 % de la SAU convertie à l’agriculture biologique à l’horizon de 2027. « Personne ne remet en question ces 18 %, tous syndicats et interprofessions confondus, confie Philippe Camburet. On travaille sur le programme ambition bio, pour que cette nouvelle version soit plus adaptée aux nouveaux enjeux et nouveaux risques. »

Car l’agriculture biologique connaît un net recul de la consommation des ménages. Le marché a perdu 600 millions d’euros entre 2021 et 2022, et près de 200 magasins spécialisés ont fermé sur cette même période. Un phénomène qui entraîne un ralentissement des conversions.

« Les paiements pour services environnementaux (PSE), les aides au maintien, sont passés à la trappe, rappelle Philippe Camburet. On a considéré que c’était le marché qui allait faire le travail. Sauf que la consommation, on le voit bien, ce n’est pas quelque chose qu’on anticipe longtemps à l’avance. On retrouve depuis plusieurs mois la conscience de nos fragilités. »

Recul des surfaces en 2023

L’année 2023 devrait probablement être la première à voir reculer les surfaces conduites en agriculture biologique. Le secteur des grandes cultures, qui représente les surfaces les plus importantes, étant particulièrement fragilisé par la crise. « De nombreux agriculteurs bio se demandent s’ils ont fait le bon choix », complète Philippe Camburet.

Comme pour d’autres filières, la Fnab réclame une meilleure structuration. « On a besoin d’un regard prospectif et quand le décrochage devient trop important, on a besoin de réguler […]. Jamais on ne laisserait dans d’autres filières, les producteurs prendre sur leur propre trésorerie 30 % à 40 % de perte de revenus. »

Des dispositifs particuliers

Les outils de régulation du marché par la réduction volontaire de production, l’aide au stockage et à la transformation ont montré leurs limites, selon le président de la Fnab, qui plaide plutôt pour la création de nouveaux outils structurant.

En attendant, le plan de soutien à l’agriculture biologique doté d’un fonds d’urgence de 60 millions d’euros est bien loin de répondre à la détresse des producteurs. « Cent millions d’euros de dossiers sont arrivés aux bureaux des Draaf, explique Philippe Camburet. Comment va-t-on faire ? On va absolument avoir besoin de répondre à ces agriculteurs. L’enjeu de déconversion se montre de plus en plus fort. »

Dernier point de blocage, l’accès aux écorégimes. « Le système est dépassé par son succès, l’enveloppe a été siphonnée avec des réductions d’aides affectées à l’agriculture biologique, déplore le président. Cela aura des conséquences pour les cinq à six ans à venir. »