« Le 28 octobre 2017, mes prés ont servi de parking à plus de 5 000 raveurs. Quand on les a vus débarquer, il était trop tard, relate Véronique Grot, éleveuse de vaches allaitantes à Louargat (Côtes-d’Armor). J’ai appelé les gendarmes. Ils m’ont dit de ne rien faire au risque que cela se retourne contre moi. Ensuite, on n'a plus que nos yeux pour pleurer. Vous êtes seuls chez vous à empêcher que les raveurs entrent dans vos bâtiments. Avec ma famille, nous restons marqués par cette période épouvantable. Heureusement, nous avons pu compter sur le soutien de la profession.

J’étais scandalisée que l’on touche à mon outil de travail. Basée sur un système 100 % herbe, j’avais plus de 4 ha piétinés, soit 10 % de ma surface. J’ai déposé plainte à la gendarmerie. J’ai aussi contacté la préfecture pour qu’ils viennent constater les dégâts. Mon assurance de protection juridique a pris en charge le constat d’huissier et l’avocat.

Les organisateurs m’ont proposé un dessous-de-table pour que je retire ma plainte. Ce que j’ai refusé. Six mois plus tard, le tribunal les a condamnés à m’indemniser 4 000 € pour réensemencer mes prairies et 500 € de préjudice moral. Le pire, c’est que ce jour-là, le juge leur a rendu leur matériel. Au bout d’un an, comme je n’avais toujours rien vu venir, j’ai contacté le Sarvi (1), un fonds de garantie des victimes d’infractions qui m’a fait une avance de 1 000 €.

Malgré mes relances, mes courriers, au bout de trois ans je n’avais toujours pas été complètement indemnisée. Je ne suis pas du genre à lâcher le morceau. Engagée professionnellement, j’ai actionné tous mes contacts. En septembre 2021, je suis allée frapper à la porte de mon député. Je lui ai expliqué ma situation. Quinze jours plus tard, j’avais la somme sur mon compte sans savoir qui a véritablement réglé. Beaucoup n’osent pas porter plainte par peur de représailles. Moi je considère que ce n’est pas à l’agriculteur de payer ! Je me suis surtout battue au nom de tous les agriculteurs parce que notre travail a de la valeur et que nous méritons le respect de tous. »

(1) Service d’aide au recouvrement des victimes d’infractions.