L’érosion humaine, titre d’un édito de La France Agricole du 30 mars 1961, résume bien l’état d’esprit de l’époque. « Il faut chercher, écrit l’éditorialiste, si le bien supérieur du pays exige vraiment qu’on continue à orienter vers le surpeuplement des villes et peut-être vers le chômage de paysans. » À l’époque, le commissaire européen à l’Agriculture, Sicco Mansholt, vient de déclarer que 8 millions de paysans européens doivent se préparer à quitter leurs exploitations dans les quinze prochaines années. On connaît la suite…
À partir des années 2000, La France Agricole multiplie dossiers et reportages sur ce thème, de « Installation, des chiffres alarmants » (édition du 14 janvier 2000) à cette enquête publiée le 21 février 2020, qui tire la sonnette d’alarme : « 50 % des chefs d’exploitations vont prendre leur retraite d’ici à dix ans. Ce qui représente à très court terme 120 000 départs par an : des chiffres vertigineux au regard du nombre d’installations. »
Le défi vaut aussi pour toute l’Europe (édition du 8 janvier 2021) où 58 % des exploitations sont gérées par des plus de 55 ans. Mais le chemin pour assurer la relève est truffé d’embûches, comme le note Yvon Herry (édition du 11 janvier 2008) : « Pour s’installer, il faut d’abord avoir un vrai projet et, pour y croire, le jeune doit trouver dans son métier de véritables perspectives. »
Sans oublier le poids du foncier : dans le dossier « Installation, alléger le fardeau » publié le 10 décembre 2010, La France Agricole estime que « la terre, denrée rare et gâteau de plus en plus convoité, vaut bien une politique ».
Une grande diversité de repreneurs
Durant ces deux dernières décennies, La France Agricole présente des initiatives pour faciliter les installations, avec l’arrivée de nouveaux acteurs : investisseurs privés comme Terre de liens, collectivités locales, régions, coopératives…
Dans le même temps, La France Agricole souligne la diversité des repreneurs : ceux qui ne sont pas issus du milieu agricole (édition du 24 septembre 2021), comme cette assistante vétérinaire qui confie dans le numéro du 4 mars 2005 : « Entre ma démission et mon installation, j’ai perdu trois ans de cotisations de retraite, mais je n’ai aucun regret. » ; ceux qui jouent la carte de la pluriactivité, « un réel levier de développement et d’épanouissement » (édition du 25 février 2022) ; ceux qui se sont installés à plus de 40 ans (édition du 13 mai 2022) ; les voisins européens, tel cet éleveur néerlandais pour qui « venir en France, c’est pouvoir s’agrandir » (édition du 10 janvier 2020) ; ou encore ceux qui s’installent en collectif (édition du 28 juillet 2023), à condition, souligne l’article, que « le projet soit bien accompagné pour que la cohésion du groupe perdure ».
Trait commun de tous ces articles : ne pas baisser les bras !