Le retour aux aides couplées à 300 €/t pour le blé dur ? C’est ce qu’attendent aujourd’hui les professionnels de cette filière. « Les bénéficiaires des aides couplées doivent être mieux ciblées, a ainsi affirmé Philippe Heusèle, secrétaire général de l’Association générale des producteurs de blé et autres céréales (AGPB), lors de la journée filière blé dur co-organisée par Arvalis, Intercéréales et l’AGPB, le 6 février 2025 à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Elles sont pleinement justifiées pour le blé dur qui se trouve aujourd’hui en danger. »

De « nombreux » freins
Car le blé dur est effectivement en danger. En 15 ans, les surfaces de cette céréale, servant principalement à la production de pâtes alimentaires, ont été divisées par deux en France pour tomber à 240 000 ha en 2024, avec une production de 1,2 million de tonnes.
Et, l’année 2025 s’annonce encore moins bonne avec une prévision à 200 000 ha au niveau national. « C’est le niveau le plus bas depuis ces dix dernières années », a annoncé Benoît Piètrement, président d’Intercéréales. « Les freins liés à la culture de blé dur sont nombreux, poursuit le responsable. Aux difficultés techniques s’ajoutent la forte hausse des coûts de production depuis 2021, la sensibilité aux aléas climatiques, ainsi que les incertitudes commerciales. »
En 2023, le blé dur bénéficiait d’une aide couplée de 54,50 €/ha (elle est de 59,50 €/ha pour 2024). Un montant insuffisant pour être incitatif pour les producteurs selon Édouard Cavalier, président de l’association blé dur développement (ABDD). Et en particulier dans la zone de culture traditionnelle (Paca et Occitanie), où les rendements sont à la peine. Il y a quelques années, cette aide était fixée à 300 €/ha avec obligation d’utilisation de semences certifiées. Le retour à ce dispositif permettrait, selon lui, de retrouver une rentabilité et ainsi « redonner l’envie de produire et relancer la filière », tout en renforçant le financement de la recherche variétale.
Marges « extrêmement variables »
« C’est une filière où les marges sont extrêmement variables d’une campagne à une autre », insiste de son côté Yannick Carel, ingénieur du pôle économie et système de production chez Arvalis. Dans ce contexte, les acteurs de cette filière attendent beaucoup du plan de souveraineté blé dur lancé l’an passé, lors du Salon de l’agriculture, auquel le ministère de l’Agriculture a apporté son soutien. Sur les 43 millions d’euros qui vont être engagés sur cinq ans, les pouvoirs publics se sont engagés à abonder à hauteur de 11 millions d’euros.
Mais là aussi, des inquiétudes planent. L’objectif étant de reconquérir 100 000 ha d’ici aux cinq années à venir. « Nous n’avons à ce jour aucune garantie sur le respect de cet engagement par le gouvernement », s’est agacé Philippe Heusèle.
La filière du blé dur veut se redynamiser (05/06/2024)
Les pâtes, féculent préféré des Français
« Ces soutiens sont indispensables, renchérit Édouard Cavalier. Il faut redonner envie aux agriculteurs de s’investir dans le blé dur. Aujourd’hui, un tiers de la collecte française est utilisé par les transformateurs français. C’est une chance ! Pour maintenir cet approvisionnement, la production tricolore doit être au rendez-vous. C’est aussi une condition sine qua non pour faire tourner les silos. S’il n’y a pas suffisamment de grains, ils fermeront. Cette baisse de la production est d’autant plus dommageable que le marché des pâtes est en pleine forme. »
Comme l’a en effet souligné Valérie Beauchêne, directrice du marketing du groupe Panzani : « Les pâtes sont le féculent préféré de nos compatriotes, 97 % des foyers français en achètent chaque année, et près deux tiers en consomment deux fois par semaine. » Les ventes de pâtes sont en constante progression : +11 % depuis 2019 en grande distribution.