« De l’eau potable et du chauffage », « manger au chaud le midi », ou encore « des toilettes accessibles ». Ces revendications semblent d’un autre temps. Et pourtant, ce sont bien les réclamations des ouvriers agricoles lors de la présentation à l’Assemblée nationale, d’une proposition de loi visant à mieux les protéger, le mercredi 24 janvier 2024.
Portée par le député André Chassaigne (PCF) et en partenariat avec la Fnaf (Fédération nationale agroalimentaire et forestière CGT), elle vise à garantir plus de droits aux « invisibles des temps modernes » grâce à trois volets : le renforcement des droits des saisonniers agricoles ; l’instauration de contrôles systématiques lors d’embauche de saisonniers ; et le renforcement de la responsabilité des donneurs d’ordre en agriculture.
Outre-mer
La proposition de loi, cosignée par le député de Martinique, Marcellin Nadeau, porte une attention particulière aux territoires d’outre-mer qui rencontrent des difficultés spécifiques. En Martinique, une grande partie de la récolte de cannes à sucre serait réalisée par des étrangers sans contrats écrits, rendant difficile la reconnaissance de leurs droits. À La Réunion, les exploitations, majoritairement en monoculture, peinent à trouver de la main-d’œuvre.
Les défenseurs de la proposition de loi espèrent, en proposant une prime d’ancienneté sectorielle et une prime de précarité, rendre plus attrayant le métier alors que les exploitations en métropole rencontrent des difficultés de recrutement similaires.
L’appel à des entreprises de travail temporaire (ETT) pour l’emploi de saisonniers étrangers se répand et dans le même temps, le non-respect des droits des salariés. La proposition de loi vise à rendre la visite médicale préalable à l’embauche obligatoire pour chaque saisonnier d’ETT et à fournir à chacun les équipements de protection et une notice expliquant leurs droits dans leur langue à leur arrivée sur l’exploitation.
Informations sur les droits
Les députés préconisent un contrôle systématique lors de la première semaine d’embauche des saisonniers agricoles pour « vérifier les conformités des contrats de travail et les conditions d’accueil » des salariés et de responsabiliser civilement et pénalement les donneurs d’ordre pour qu’ils ne puissent plus « prétexter de cette méconnaissance du droit ».
Les responsables de la Fnaf-CGT pointent une « contradiction entre le temps de travail et le paiement à la production », notamment en viticulture et dans les territoires d’outre-mer. Face à des dérogations pour allonger la durée du temps de travail à 60 heures « abusives », la proposition de loi entend les limiter à 15 jours (reconductibles).
Dans un contexte de tension agricole, la loi est une protection « pour les salariés et les employeurs » assure André Chassaigne, qui défend une formation obligatoire des exploitants sur les droits des salariés.
Le député espère qu’une partie des mesures sera intégrée dans le projet de loi d’orientation agricole, dont la présentation a été repoussée par les manifestations des agriculteurs.