Pour suivre le marché du tournesol, c’est du côté de la mer Noire que les analystes ont les yeux tournés. « Il y a eu des vagues de chaleur et un déficit hydrique important en Ukraine et en Russie, ainsi qu’en Roumanie et en Bulgarie », relate Maxence Devillers, analyste chez Argus Media. Ces deux derniers pays représentent 40 % de la production européenne.
Le cabinet s’attend, sauf surprise, à « des pertes de production assez importantes » : un peu plus de 1 million de tonnes à l’échelle européenne (sur une production d’environ 10 millions de tonnes), 2 millions de tonnes en Ukraine (sur 15 millions de tonnes) et 1,5 million de tonnes en Russie (sur 16 millions de tonnes). Si ces estimations se confirment à la récolte, qui a déjà débuté en Europe de l’Est, le bilan s’annonce donc tendu.
Le soja comme variable d’ajustement
Toutefois, ces éléments ont déjà été intégrés par les marchés, et se reflètent dans les prix actuels du tournesol. « Depuis quelques jours, il est plus cher que le colza, ce qui n’était pas le cas au moment des semis, lorsqu’on avait de bonnes perspectives de production, rappelle l’expert. Mais ensuite, le tournesol n’a pas suivi la baisse du colza. » Le différentiel de prix entre les deux fait baisser la demande.
« Si les prévisions se confirment, le tournesol va désormais plutôt évoluer dans le sillage du complexe oléagineux, explique Maxence Devillers. Les éléments sont plutôt bien connus en colza. La dernière variable d’ajustement sera le soja. Il peut encore se passer beaucoup de choses mais on se dirige vers un bilan mondial lourd, avec une production record aux États-Unis, qui doit malgré tout encore être confirmée. »
Le Pro Farmer Crop Tour, qui y évalue la production, est en cours et pourrait être source de volatilité. « On se dirige vers une fin de cycle sèche, indique Maxence Devillers. Ce n’est pour l’heure pas un problème car les réserves hydriques étaient bonnes aux États-Unis mais il faudra y rester vigilant. »
Estimations françaises
Le ministère de l’Agriculture évalue au 1er août le rendement moyen français du tournesol à 23,2 q/ha. La production tricolore atteindrait 1,9 million de tonnes : cela représente une baisse de 10,1 % par rapport au record de 2023, mais une hausse de 6,8 % comparé à la moyenne de 2019 à 2023.
Argus Media estime pour sa part la production française à 1,7 Mt. Le cabinet juge que les conditions météo sont globalement favorables, mais reste attentif à l’hétérogénéité. Elle sera probablement marquée cette année, notamment en lien avec les dates de semis étalées et les difficultés constatées lors de la levée.