« Le soutien à la filière de la volaille de chair est historiquement marginal. » C’est ce que révèle un rapport de la Cour des comptes publié le 3 septembre 2024, qui remonte jusqu’en 2013 pour en comprendre les origines. Cette année a marqué un tournant pour la filière qui a vu disparaître ses aides à l’exportation sans pour autant obtenir de compensation de la politique agricole commune (Pac).

Perte du statut de première exportatrice européenne

Jusqu’en 2013, rembobine la Cour des comptes, une partie de la filière du poulet, de la dinde, du canard à rôtir, de la pintade, de la caille et du pigeon, était tournée vers le marché de l’exportation. Alors première productrice et exportatrice de viande de volaille de chair en Europe, elle était soutenue par des systèmes d’aides à l’exportation mis en place en 1967 dans le cadre de l’organisation commune des marchés (OCM).

Appelées « restitutions », ces aides européennes ont été peu à peu diminuées avant d’être supprimées en 2013, la France perdant ainsi son statut privilégié qu’elle détenait depuis la fin des années 1990.

Une filière marginalisée par la Pac

Première bénéficiaire des restitutions, la filière française a ainsi été « marginalisée », d’autant plus qu’elle n’a jamais fait partie des productions aidées par la Pac. Le principal soutien apporté aux éleveurs de volailles de chair au titre des aides directes de la Pac leur est attribué au titre de leurs ateliers de production agricole complémentaires.

À titre d’exemple, la Cour des comptes écrit qu’en 2022, les fermes avicoles représentaient 4 % du nombre total des exploitations en France et percevaient « seulement » 1,2 % des aides à la production de la Pac.

Seules les petites entités sont soutenues

Plus encore, les aviculteurs ont « peu profité » du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE), principal dispositif de soutien à l’investissement du deuxième pilier de la Pac. Ils n’ont reçu que 5 % des crédits entre 2015 et 2022. Cet « accès limité est en décalage avec les besoins de la filière », insiste la Cour des comptes.

Pourquoi si peu de soutien à la filière, interroge le rapport ? Les aides de l’État, constate-t-il, se sont « concentrées » sur la modernisation des abattoirs à travers des plans d’investissement, tels que France Relance, France 2030, ou encore le plan Investissement d’avenir. Au total, 40 millions d’euros ont été alloués aux éleveurs, mais seules les petites exploitations ont pu en bénéficier, délaissant les plus grands effectifs.

L’influenza aviaire assomme les éleveurs

La marginalisation de la filière de la volaille de chair par la Pac et les stratégies de développement « n’ont, jusqu’à présent, pas permis de répondre à la demande croissante du marché national », conclut la Cour des comptes. Et à cela s’ajoutent la multiplication et l’intensité croissante des épisodes d’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) auxquels la filière doit faire face.

Depuis 2015, quatre épisodes de grippe aviaire se sont succédé, obligeant l’État à mettre en place des aides conjoncturelles, en partie cofinancées par l’Union européenne, pour soutenir les exploitations et les entreprises touchées. Des dépenses budgétaires de plus en plus importantes, dont la soutenabilité est mise en question dans le rapport.

Au total, la Cour des comptes appelle à une « clarification de la position de l’État, des régions et des professionnels pour aboutir à un plan cohérent », dont les moyens à mobiliser « devront être ajustés une fois les choix stratégiques définis ».