L’institut Harris Interactive et l’Institut français du goût ont conduit une étude (les 20 et 21 février 2024, 1 058 personnes) sur les Français et leur alimentation quotidienne. Cette enquête sert de base de travail à un projet, porté par la ministre de la Consommation, Olivia Grégoire, qui vise à réintroduire des cours obligatoires de cuisine à l’école primaire. À ses yeux, l’éducation alimentaire est un enjeu essentiel pour toute la filière et pour la santé puisqu’elle structure durablement nos habitudes de consommation. Périco Legasse, le secrétaire général de l’Institut du goût, partage cette ambition : « La malbouffe progresse, c’est vrai, mais l’enquête de Harris Interactive me donne de l’espoir. La prise de conscience est formidable. Il faut maintenant que les consommateurs français se tournent vers leurs agriculteurs et repensent leur manière de se nourrir. »

« En résumé, il y a un consensus pour retrouver le sens de la saisonnalité, de l’origine, de la nécessité de cuisiner les produits bruts. Mais cette étude met en lumière de nombreux points inattendus qui montrent qu’il reste du travail à faire », synthétise la ministre Olivia Grégoire en présentant l’étude, le 5 mars 2024.

https://www.dailymotion.com/video/x8tw5aa?Autoplay=1

  1. 20 % des jeunes ne reconnaissent pas une courgette

    Ce sera à coup sûr le chiffre emblématique qui prouvera la nécessité de relancer l’éducation alimentaire : 20 % des jeunes (15-24 ans) ne reconnaissent pas les courgettes quand on leur présente une photo clairement explicite. Ils peuvent la confondre avec un concombre (18 %) ou une aubergine (2 %). Cette proportion est nettement plus grande que la population générale : 11 % tout de même avec des confusions similaires avec un concombre ou une aubergine. Cette ignorance n’est pas valable pour tous les fruits et légumes. Une photo de chou-fleur est clairement reconnue par 99 % de la population générale et 96 % des jeunes. Le pamplemousse est plus troublant : 13 % des jeunes ne le reconnaissent pas mais 16 % de la population générale fait de même.

  2. Les jeunes sont accros aux produits transformés

    Dans la population générale, 42 % des enquêtés mangent à la maison un produit transformé acheté à l’extérieur. Ils sont nettement plus (57 %) parmi les jeunes. Ce chiffre est d’autant plus surprenant que le prix est une préoccupation essentielle de la jeunesse, par ailleurs englué dans la marée montante de la précarité professionnelle. D’ailleurs, sept Français sur dix estiment qu’il est moins cher de s’alimenter avec des produits frais ou bruts que d’acheter des plats transformés en grande surface. Mais ce chiffre retombe à 51 % dans la population jeune. De plus, d’autres critères sont mis en avant par les adeptes des produits transformés : la rapidité et la santé. En effet, ils estiment que les produits transformés sont meilleurs pour la santé que les produits bruts, ce qui va à l’encontre de l’unanimité des nutritionnistes. On retrouve cet attrait pour les produits transformés quand on s’interroge sur les fréquences de consommation : 23 % de la population générale mais 44 % des jeunes déclarent en consommer plusieurs fois par semaine.

  3. Un tiers des jeunes ne mange pas de fruits et légumes

    Mangez-vous des fruits ou des légumes frais plusieurs fois par semaine ? Les jeunes répondent oui à cette question à seulement 66 % (fruits) et 72 % (légumes). En comparaison, la population générale répond oui à 81 %. En revanche, les jeunes consomment plus de féculents que la population générale (89 % contre 81 %), de conserves et bocaux (40 % contre 31 %) et, encore une fois, de plats transformés. C’est pourtant cette génération qui a été éduquée dès son plus jeune âge aux recommandations du plan national nutrition santé (PNSS), les fameux « Mangez, bougez » et autres « Cinq fruits et légumes par jour ». Ces règles ont été bien retenues. Les jeunes rejoignent la population générale dans son désir de consommer plus de fruits et légumes frais s’ils en avaient la possibilité (92 et 95 % respectivement). « C’est donc plutôt une question de faisabilité ou de connaissance qui explique la différence entre l’aspiration à mieux manger et la réalité », commente Jean-Daniel Levy, directeur délégué de Harris Interactive.

  4. Le supermarché en héritage

    C’est assez facile à constater : les Français font leurs courses alimentaires dans les supermarchés (85 %, plusieurs réponses possibles). Mais les jeunes les déserteraient-ils au profit, par exemple, de l’internet ? Pas du tout. Ils sont 90 % à déclarer acheter leurs aliments dans les grandes surfaces. Pour Jean-Daniel Lévy, ce score montre l’implantation de l’idée que les prix les moins chers se trouvent dans les supermarchés. Les commerçants de proximité en pâtissent un peu (42 % contre 37 % chez les jeunes) et les marchés de plein vent en pâtissent beaucoup (35 % contre 18 %). Il n’y a pas de différences de génération au sujet des achats alimentaires via l'internet (7 %).

  5. La restauration rapide trouve son public

    Le questionnaire s’est penché sur le type de restaurant que les jeunes fréquentent quand ils mangent à l’extérieur du foyer. C’est la restauration rapide qui remporte la mise. Ils sont 59 % à y avoir mangé au moins une fois dans le mois qui précède (contre 37 % pour la population générale, plusieurs réponses possibles). Les restaurants à thème (pizzeria, kebab, etc.) attirent aussi les jeunes : 45 % contre 31 % pour la population générale. Les brasseries et les établissements de cuisine française sont moins fréquentés mais ne sont pas le sujet d’une fracture générationnelle : 26 % et 27 %.

  6. Les influenceurs ont du succès

    49 % des jeunes se renseignent ou trouvent leurs recettes sur les réseaux sociaux (Instagram, Facebook, TikTok…). C’est nettement plus que la population générale au sein de laquelle, ils ne sont que 26 % à citer ce canal. Les jeunes mettent aussi en avant leurs proches (46 %, plusieurs réponses possibles). Sans doute que ce chiffre reflète qu’une bonne part des 15 à 24 ans habitent encore chez leurs parents puisque l’autonomisation de l’habitat intervient à 23 ans en France, selon Eurostat. De son côté, la population générale déclare se renseigner plutôt par des livres de recettes (46 %) et des sites ou applications spécialisés (36 %).