Cheveux courts, fines lunettes noires, chemisier à fleurs, Véronique Pénin, 62 ans, a un petit air classique. Mais ne vous y fiez pas ! Au sud du Berry, à Crozon-sur-Vauvre (Indre), c’est une artiste engagée et qui ose la dérision, qui nous accueille dans sa ferme de 80 hectares.
Monter sur les planches pour parler de son métier
Depuis 25 ans, cette agricultrice monte sur les planches avec six autres copines pour parler de son métier. « En 1998, à la suite de la vache folle et face aux injustices médiatiques, nous voulions ouvrir nos fermes. Avec le Groupement de vulgarisation agricole féminin, nous avons organisé des balades commentées », se souvient cette Bretonne d’origine.
Peu à peu, la troupe, qui regroupe des paysannes du Boischaut sud et des femmes soucieuses de la ruralité, opte pour une formule culturelle. En 2017, l’association Brind’elles émerge, avec l’appui de l’Adar-Civam qui favorise le développement agricole et rural. L’objectif est clair : faire passer des messages sur le métier d’agricultrice, voire dénoncer des injustices, avec humour et une touche de féminisme.
Des mots pour le dire
Depuis cinq ans, Brind’elles accueille une comédienne, metteur en scène, qui devient la coach du groupe. Sylvie Caillaud n’hésite pas à faire 50 km pour venir aux répétitions, une fois par mois. « Avant je n’écrivais pas, avoue Véronique. Sylvie m’a encouragée et maintenant, j’ose ! Avec l’humour, on ne se heurte pas frontalement aux sujets, on tisse des liens entre les mondes. »
Cette année, dans « On perd les eaux ! », Véronique a écrit un poème « le ruisseau ». Les rimes dénoncent le manque d’eau et critiquent les « bassines », « la belle captive dans des prisons ». D’une voix timide, l’éleveuse de vaches allaitantes bio, installée en EARL avec son mari Guy, nous confie : « On n’hésite plus à être mordantes. On a tant de choses à revendiquer, du Gaec, initialement interdit entre époux, aux petites retraites en passant par les pesticides. Mais c’est toujours une vision positive de notre métier. »
Le 1er juillet 2023, Brind’elles a joué « On perd les eaux » chez l’éleveuse Nathalie Pinault à Aigurande. La soirée, très conviviale, s’est prolongée au rythme des guitares.Véronique ne regrette qu’une chose : travailler dur toute l’année pour une seule représentation. À quand une tournée hexagonale ?