Il y a « un certain nombre d’incohérences ou de manques importants parmi certains des tableaux de maladies professionnelles existants », a constaté l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (Anses) dans un avis publié fin avril, estimant qu' une « mise à jour » est nécessaire. Ces tableaux de maladies professionnelles permettent aux personnes atteintes de faire reconnaître leur maladie auprès de la sécurité sociale et, parfois, de percevoir une indemnisation.

« Incohérences » entre le régime général et agricole

L’Anses recommande « l’harmonisation des tableaux de maladie professionnelle (TMP) entre les régimes de Sécurité sociale » observant que des « incohérences sont constatées entre les TMP des régimes général et agricole concernant les désignations de maladies, les délais de prise en charge ou les durées d’exposition ».

L’agence constate aussi le « caractère limitatif des listes de travaux » et plaide pour mieux prendre en compte les poly-expositions, actuellement « peu ou pas prises en compte ». « Les agriculteurs sont, comme l’ensemble des travailleurs, […] concernés par les enjeux de la poly-exposition », explique Giovanni Prete, sociologue et vice-président du groupe de travail qui a rédigé l’avis.

Quatre tableaux à revoir

Un « décalage » est aussi constaté par les scientifiques entre l’état des savoirs et la création des tableaux, indique le sociologue avec « des facteurs de risques professionnels avérés ne faisant pas l’objet de tableaux ».

Ces constats pris en compte, l’agence sanitaire recommande une « révision complète » de quatre tableaux de maladies professionnelles inscrites au régime agricole :

  • Le tableau n° 39 : « Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail ; Poignet — main et doigt » (troubles musculosquelettiques) ;
  • Le tableau n° 44 : « Affections cutanées et muqueuses professionnelles de mécanisme allergique » ;
  • Le tableau n° 45 : « Affections respiratoires professionnelles de mécanisme allergique » ;
  • Le tableau n° 57 bis : « Chroniques du rachis lombaire provoqué par la manutention manuelle de charges lourdes ».

D’autres nécessitent des « évolutions ponctuelles » notamment pour les affections provoquées par l’arsenic et ses composés minéraux (tableau n°10D), les affections provoquées par les rayonnements (tableau n° 20), les affections respiratoires consécutives à l’inhalation de poussières textiles végétales (tableau n° 54), les atteintes auditives provoquées par les bruits lésionnels (tableau n° 46).

« Sous-déclaration des maladies »

Enfin, l’Anses rappelle qu’il y a une « existence d’une sous-déclaration des maladies en lien avec des expositions rencontrées en milieu professionnel en partie dû à l’absence de tableaux de maladies professionnelles pour ces maladies. »

Cette sous-déclaration aurait un coût pour la branche maladie (privée) puisque celle-ci indemniserait les malades à la place de l’assurance maladie (d’origine professionnelle) prévue à cet effet : l’ATMP (financée notamment par les cotisations ATEXA). Ce coût, est « évalué entre un milliard et deux milliards d’euros par an » d’après la Commission sur la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles en 2021.

Dans le secteur agricole, les troubles musculo-squelettiques sont la première cause de maladie professionnelle indemnisée d’après la MSA. En 2024, 1 900 maladies professionnelles ont été déclarées parmi les non-salariés agricoles auprès de la MSA.