La filière de la viande bovine a toujours été en pointe mais de nouvelles branches de l’agriculture française sont venues grossir les rangs depuis. Volailles, céréales, sucre… Toutes sont venues exprimer, encore une fois le 13 novembre 2024 à Paris, leur rejet de l’accord de libre-échange avec le Mercosur. À l’aube de possibles nouvelles mobilisations agricoles, le sujet revient brusquement dans l’actualité.
99 000 tonnes de viande bovine supplémentaires sans droit de douane
Pour appuyer leur propos, chaque représentant de filière a d’abord avancé les chiffres qui font mal. Patrick Benezit, vice-président d’Interbev et président de la FNB en tête. « Cet accord est une menace pour toutes nos filières. Les 99 000 tonnes de viande bovine supplémentaire sans droit de douane, c’est quelque chose d’énorme puisque ça peut être constitué uniquement d’aloyau, un morceau noble. Ce marché en Europe c’est 400 000 tonnes », a-t-il rappelé.
Même alerte du côté de la volaille. Jean-Michel Schaeffer, président d’Anvol, rappelle que « la volaille est la viande la plus importée dans l'Union européenne et le Brésil fournit déjà près de 300 000 tonnes. Ajouter 180 000 tonnes sans droit de douane va approvisionner les marchés en croissance qui sont aujourd’hui les produits élaborés et la restauration hors domicile », analyse-t-il.
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Les normes, toujours
Filière qui a rejoint le mouvement depuis peu, celle des céréales. Franck Laborde, de l’Association des producteurs de maïs (AGPM) et Intercéréales, fustige un accord qui pourrait accélérer les importations de maïs brésilien en Europe. « Après avoir été autosuffisants en Europe, nous en sommes déjà à importer 25 % de notre maïs. Une majorité vient du Brésil et il y a de graves distorsions de concurrence. Nous avons comptabilisé que 77,5 % des produits phyto utilisés là-bas sont interdits en Europe. »
La question des écarts de normes était aussi un argument d’Alain Carré, président de l’interprofession de la betterave et du sucre et administrateur de Tereos, présent au Brésil. « Pour produire du sucre au Brésil, il y a 40 substances actives que nous avons identifiées qui sont interdites dans l’Union européenne. Et il n’y a aucune traçabilité relative aux OGM », ajoute-t-il.
Un nouvel appel au gouvernement
S’en sont suivies des revendications fermes à l’adresse de la Commission européenne et du gouvernement. « Personne ne comprendrait qu’on puisse signer ce type d’accord. Notre attente, c’est que sa signature passe aux oubliettes, appelle Patrick Benezit. Nous appelons le gouvernement et le chef de l’État à arrêter ces négociations le plus rapidement possible. »
Ces filières n’étaient pas seules. Une poignée de parlementaires dont Dominique Potier, député de la Meurthe-et-Moselle, Stéphane Travert, ancien ministre de l’Agriculture et député de la Manche, ainsi que Laurent Duplomb, sénateur de la Haute-Loire, sont venus leur prêter main-forte. « Nous ne pouvons pas demander aux paysans français de faire le green deal s’ils sont concurrencés par des productions et des pays qui ne respectent pas nos normes », relève le socialiste Dominique Potier.
Il en appelle à l’application de mesures miroirs, mais pas seulement. Une résolution européenne vient d’être adoptée par la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale. « Il faut inverser la charge de la preuve. C’est l’obligation pour ceux qui exportent en Europe d’avoir une certification d’un organisme indépendant agréé par l’Union européenne qui certifie qu’en amont, ils respectent les standards internationaux en santé humaine, en environnement et en bien-être animal. »
Ces parlementaires insistent aussi pour éviter une dissociation de l’accord commercial du reste du traité. Un scénario qui ne permettrait pas à la France d’opposer son véto.