Il reste désormais à concrétiser ces engagements dans un marché international où les origines de l’hémisphère Sud se montrent attractives, tant en oléagineux qu’en céréales. Dans ce contexte, la détente de l’euro face au dollar apporte un élément supplémentaire de soutien aux cours européens.
Le blé en test de zone de résistance
Les cours du blé ont retrouvé une certaine vigueur cette semaine, portés en grande partie par le repli de la parité de l’euro avec le dollar. L’euro a ainsi enregistré son plus faible niveau face au dollar depuis trois mois, repassant temporairement sous 1,15. Mécaniquement, cet élément a soutenu les prix européens et français. En zone portuaire, à Rouen, les cours ont ainsi atteint en milieu de semaine 194 €/t en base juillet, soit un niveau équivalent à celui de la fin d'août avant de s’essouffler.
De plus, le rebond des prix sur le marché américain, tiré par de possibles achats chinois, a également animé à court terme les différents marchés et offert un argument supplémentaire pour la hausse. Les fonds d’investissement se sont d’ailleurs repositionnés aux achats, tant sur les marchés à terme de Chicago que sur Euronext, poussant les prix à retrouver leurs plus hauts niveaux depuis août dernier.
Malgré ce mouvement de hausse, les origines ouest européennes affichent actuellement des prix attractifs par rapport aux origines mer Noire, mais les exportateurs restent vigilants face à l’arrivée des blés de l’hémisphère Sud. En effet, les prix argentins pour des blés de qualité 11,5 % de protéines, en ancienne récolte, s’affichent actuellement à 210 $/t Fob pour des livraisons rapprochées. C'est leur plus bas niveau depuis mars 2024, dans la perspective d’une production argentine record. Les estimations actuelles, autour de 23 millions de tonnes d’après les analystes d’Argus Media, confirment un potentiel argentin supérieur à la récolte de 2021, qui avait dépassé 22 millions de tonnes. Cette perspective pèse donc, dès à présent, sur les prix argentins en nouvelle récolte, pour des opérations à l’exportation dès le début de campagne négocié sur des prix moindres. Cette situation confirme l’arrivée de nouveaux compétiteurs sur le marché international face aux origines européennes.
En nouvelle récolte, les travaux de semis ont bien progressé. En France, d’après Céré’Obs, les semis de blé d’hiver se finalisent, avec des travaux réalisés qui atteignaient déjà 79 % au début de novembre. Sur le marché de la récolte de 2026, les niveaux de prix évoluent toujours en report, avec des prix souvent négociés autour de +10 €/t en équivalent base juillet par rapport à la récolte de 2025.
Retour de la demande notamment nord-européenne en maïs
Le marché du maïs américain gagne en fermeté après les négociations réalisées entre la Chine et les États-Unis la semaine dernière. En effet, la perspective d’une hausse de la demande chinoise en soja dans les mois, mais surtout les campagnes à venir, si les engagements sont tenus, devrait favoriser les cultures de soja aux États-Unis au détriment du maïs. Cela risque ainsi d’entraîner une réduction des assolements après une surface record en maïs cette saison. Les prix de la récolte de 2026 ont ainsi progressé sur le marché de Chicago, tirant avec eux ceux de la récolte de 2025. Pour cette dernière, les prix se négocient désormais sur leurs plus hauts niveaux depuis l’été, avec pour l’échéance de décembre 2025 du marché à terme du CME, la zone de 4,30 $ le boisseau désormais atteinte, soit un rebond de 10 % par rapport aux plus bas des prix affichés en août dernier. Face à la situation de shutdown où l’administration américaine fonctionne avec un budget limité et des équipes restreintes, les prochaines publications de l’USDA seront suivies avec grand intérêt. De nouvelles estimations sont ainsi attendues dès la fin de la semaine prochaine pour le maïs, avec une révision des rendements et du potentiel de production aux États-Unis.
En Europe, les cours progressent aussi, soutenus comme les autres céréales, par la détente de l’euro face au dollar. Cet élément surenchérit le coût des importations de maïs en Europe. Le retard des récoltes en Ukraine, mais aussi en Pologne, anime également le marché qui fait face à des disponibilités à court terme un peu moins élevées qu’espéré. Cette situation profite notamment au maïs français, dont la récolte est désormais avancée à 90 %, selon les derniers chiffres de FranceAgriMer. Un certain regain d’intérêt pour le maïs d’origine France se fait ainsi sentir, tirant les prix à la hausse par rapport à la semaine précédente. Sur le marché du Fob Rhin, le maïs s’est apprécié d’environ +6 €/t, atteignant jusqu’à 195 €/t en équivalent base juillet au plus haut de la semaine. Dans d’autres régions françaises, la hausse est moins marquée mais reste significative.
Essoufflement des cours du colza
Les cours du colza montrent un essoufflement depuis une semaine. La graine de colza ne profite ainsi pas du regain de fermeté des graines de soja observé sur le marché américain, après les engagements annoncés par la Chine de se repositionner sur des volumes conséquents d’achats en soja d’origine américaine d’ici à la fin de l’année. En France, la graine de colza pour la récolte de 2025 repasse ainsi sous le niveau de 480 €/t en Fob Moselle et suit le mouvement de tassement également observé sur le marché canadien après le récent rebond de la semaine dernière.
En Europe, les cours de l’huile de colza se sont repliés également sur la semaine, repassant sous 1 100 €/t en équivalent Fob Rotterdam pour des livraisons rapprochées. Les autres huiles végétales enregistrent aussi un tassement, notamment l’huile de palme qui reflue à son plus bas niveau depuis trois mois. Cette situation pèse sur les prix de la graine. De plus, l’approche de la nouvelle récolte en Australie et l’arrivée de nouveaux volumes canadiens sur la scène internationale rassurent pour le moment, favorisant un mouvement de détente après le rebond observé depuis un mois.
Le rebond du dollar face à l’euro n’a finalement pas permis un regain de fermeté des cours du colza face à des marchandises d’importation. Les prix négociables pour des graines canadiennes ou australiennes ont peu évolué et restent attractifs pour les importateurs européens. Le tassement demeure toutefois limité, avec une situation tendue sur d’autres oléagineux, à l’image de la graine de tournesol sur la campagne en cours. En nouvelle récolte, le marché du colza oscille au gré des mouvements de la campagne en cours, avec des niveaux affichant souvent une décote d’environ –10 €/t par rapport à la campagne actuelle. Malgré ce mouvement d’essoufflement, les prix demeurent proches des plus hauts négociés en nouvelle récolte depuis la période des semis. Sur Euronext, l’échéance d'août 2025 se négocie ainsi autour de 465 €/t.
Léger repli des prix du soja après la forte hausse
Les cours des tourteaux de soja ont marqué un véritable rebond depuis deux semaines. Les prix ont poursuivi leur progression jusqu’au milieu de la semaine, avant qu’un mouvement de correction ne s’observe tant sur le marché européen qu’aux États-Unis. À Chicago, les prix ont bondi jusqu’à tester le niveau important de résistance de 325 $/short ton avant de se replier. Les cours américains ont ainsi progressé de plus de 15 % sur un mois.
Les cours réagissent directement à la hausse des prix américains, portée par la perspective d’un courant d’affaires en graines de soja à l’exportation vers la Chine. De plus, le raffermissement du dollar face à l’euro accentue ce regain de fermeté des cotations européennes. Néanmoins, depuis le repli observé sous 1,15 au milieu de la semaine, l’euro se raffermit face au dollar et retrouve un niveau équivalent à celui de la fin de la semaine passée. En France, les prix en délivré Montoir pour des livraisons rapprochées repassent désormais sous 370 €/t, après avoir dépassé 375 €/t le mercredi 5 novembre 2025 et atteint leurs plus hauts niveaux depuis février dernier. Le mouvement a été similaire sur les échéances éloignées, sachant que la mise en place annoncée du règlement européen contre la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE) ajoute également un facteur de soutien. Les prix des tourteaux de soja pour le premier semestre de 2026 s’affichent autour de 380 €/t, un niveau qui reste élevé par rapport aux volumes négociés en cette fin d’année 2025.
(1) Argus Media, société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, nous livre son analyse agricole hebdomadaire.
(2) À suivre : déploiement de l’accord commercial trouvé entre les États-Unis et la Chine ; ajustement de la parité euro-dollar ; publication par l’USDA de nouvelles estimations des rendements et de la production en maïs et en soja aux États-Unis ; progression des semis en Europe et au Brésil ; suivi des retards de récolte de maïs en Ukraine et en Pologne ; évolution des prix des blés argentins.