Depuis octobre 2024, l’Ufab (1), filiale du groupe Le Gouessant, Chambre d’agriculture de Bretagne et Terres Inovia coordonnent une plateforme affectée à la féverole bio, à Bais, en Ille-et-Vilaine. Son objectif : étudier le comportement de la féverole, sur plusieurs variétés et dans le contexte pédoclimatique de la région.
En culture pure ou en assoiation
« Douze modalités en bande ont été mises en place, en culture pure ou en association avec des céréales, indique François Rousselière, responsable commercial à l’Ufab. Celle consistant à semer des variétés de printemps (sans vicine-convicine (2)) à l’automne nous intéresse tout particulièrement. »
En effet, avec le changement climatique, les gelées d’hiver se font de plus en plus rares. Cette conduite deviendrait donc envisageable pour les producteurs de féveroles. « Nous pourrions étendre le territoire d’implantation de la culture », résume le conseiller.
Il faut dorénavant attendre les récoltes de l’été pour établir un premier bilan, mais les observations en cours de campagne sont pour l’heure satisfaisantes. « Une féverole de printemps semée à l’automne va avoir tendance à moins brancher, ce qui veut dire qu’il faut la semer plus dense », recommande François Rousselière, d’après son retour d’expériences sur d’autres sites expérimentaux.
Protéines texturées
Cette plateforme permet d’alimenter la recherche mais aussi le développement des filières de l’Ufab, notamment pour l’alimentation humaine. En 2022, la société a investi dans son usine de Noyal-sur-Vilaine (3) pour produire des protéines texturées à base de féverole et de pois. Ses clients sont des industriels de l’agroalimentaire et des entreprises de la restauration collective, qui utilisent ces ingrédients dans leurs recettes, le plus souvent végétariennes.
« Nous sommes en capacité de valoriser 3 500 tonnes de graines par an », précise Sébastien Courtois, responsable de l’activité des ingrédients à l’Ufab. L’expert constate « une accélération » de la végétalisation des assiettes, avec des clients qui assument désormais pleinement leur stratégie du végétal. « Ce virage doit cependant se faire sans concurrence avec les protéines animales. Nous cherchons aussi à montrer qu’il existe d’autres manières de consommer des légumineuses, en sortant du classique lentille-pois chiche. »
Garantis sans gluten
Les producteurs qui livrent à Noyal-sur-Vilaine ne peuvent associer la légumineuse qu’à une seule autre culture. « Pour leur autoconsommation, les éleveurs peuvent opter pour des mélanges plus complexes, comme sur la parcelle qui accueille la plateforme (pois, triticale, féverole). Cependant, les coûts de triage seraient trop importants pour l’usine », explique François Rousselière.
De plus, le site n’utilisant pas de matières premières allergènes, ses clients lui demandent des garanties « sans gluten ». « La norme est une teneur inférieure à 20 ppm, soit deux grains de blé par kilo de pois, illustre Sébastien Courtois. Un nettoyage fin s’impose donc à toutes les livraisons de graines. »
Cette exigence est d’autant plus nécessaire que les possibilités d’adaptation au champ sont limitées. « En bio, la féverole en pur est possible, explique François Rousselière. C’est beaucoup plus difficile pour le pois à cause de sa sensibilité à la verse. » Si l’option d’un pois protéagineux de petite taille est possible, elle créerait un autre problème avec la concurrence des adventices.
« On pourrait aussi réfléchir à d’autres cultures associées, mais les cycles ne collent pas toujours », complète-t-il. Quant à des céréales moins riches en gluten, là aussi les possibilités sont limitées : « L’avoine a tendance à verser et l’épeautre est une culture au marché limité. »
(1) Union française d’agriculture biologique. (2) La vicine et la convicine sont deux molécules responsables du favisme, une maladie touchant les globules rouges. En France, on estime à 250 000 le nombre de personnes génétiquement sensibles à cette pathologie. (3) Le site collecte aussi du pois brun et de la féverole d’hiver pour l’alimentation animale