Pour assurer la sécurité alimentaire de la population mondiale, il pourrait être nécessaire de doubler la production agricole d’ici à 2050 (1). Mais « l’augmentation des rendements ne doit pas délaisser la santé environnementale, et l’agriculture de précision fondée sur des bases de données » offre là une vraie solution sur le long terme, estime l’Office européen des brevets (OEB). L’organisation livre ainsi un rapport sur les évolutions technologiques dans l’agriculture ces dix dernières années, en Europe et dans le monde.
Les résultats de cette étude des dépôts de brevets publiée en septembre 2025 sont sans appel : jusqu’en 2012, le rythme des inventions en agriculture numérique se situait dans la moyenne des autres domaines techniques. Mais depuis une dizaine d’années, il augmente trois fois plus rapidement, avec une croissance moyenne annuelle de 9,4 % du nombre de demandes de brevets déposées dans le secteur.

La production végétale en tête
Cette accélération de l’innovation concerne en premier lieu la production végétale, secteur qui voit le nombre de demandes de brevet multiplié par sept en vingt ans. Les nouvelles technologies relèvent des domaines de l’imagerie et de la détection via des capteurs afin d’optimiser les opérations de pulvérisation et les périodes de récolte. Depuis 2018, le rapport note même « une augmentation notable de l’analyse des données et des inventions liées à l’IA (intelligence artificielle), tandis que les technologies basées sur les drones ont pris de plus en plus d’importance à partir de 2019 ».
L’élevage pour sa part concentre des inventions sur la surveillance des animaux, la robotisation et l’automatisation de certaines tâches telles que le nettoyage, l’alimentation ou la traite.
Fort dépôt des fabricants de machines agricoles
L’OEB souligne par ailleurs que le secteur privé a largement pris la main sur le marché des innovations agricoles par rapport aux acteurs publics, puisqu’il y est aujourd’hui très largement dominant avec 88 % des brevets déposés. Les principaux dépositaires de brevets sont les fabricants de grandes machines agricoles, avec en premières positions les entreprises John Deere, CNH international et Claas.
Le secteur de l’élevage investit aussi fortement dans la recherche et développement, avec des têtes de pont comme Lely et Delaval, quand LG et Panasonic sortent par le haut du panier sur le créneau des serres intelligentes. Enfin, BASF et Bayer sont les plus gros dépositaires de brevet dans les technologies de soutien, comme la lutte antiparasitaire.
L’Europe, région la plus innovante sur l’agriculture
De manière générale, « les États membres de l’OEB ont toujours été forts en matière d’agriculture numérique et sont restés la plus grande zone d’origine des brevets du secteur tout au long de la période allant de 2000 à 2022 », relève l’office européen. Si l’Europe occupe encore la première place du classement des innovateurs agricoles, elle est suivie de près par l’Asie qui a dépassé l’Amérique du Nord en 2020. Avec l’Amérique du Sud, l’Asie enregistre la plus forte progression de dépôts de brevets internationaux sur l’agriculture numérique lors de la dernière décennie, bien que les deux continents partent de plus loin.
Selon les auteurs du rapport, les petits exploitants agricoles d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine « commencent seulement à adopter ces technologies ». À l’avenir, « la baisse de leur coût, associée à des politiques de soutien, devrait conduire à un impact significatif de l’agriculture numérique sur la production alimentaire mondiale », concluent-ils.
(1) Gladek et al., 2017.