Et si l’on pouvait prédire les performances d’un bovin avant même d’en observer la descendance ? C’est l’objectif que s’est fixé la race limousine depuis 2010, en développant les tests génomiques (méthode EvaLiM). «Cela permet de sécuriser les choix, dès le sevrage des animaux », explique Solange Faurisson, cheffe de service chez Ingenomix, société de biotechnologies créée à l'initiative des professionnels de la race limousine.Cette pratique est très répandue chez les sélectionneurs.Elle gagne désormais les élevages dont la vente de reproducteurs n’est pas le coeur d'activité.
L’enjeu est de taille : anticiper les performances non visibles à l’œil nu, par un simple prélèvement de poils ou de cartilage. Ouverture pelvienne, croissance, production laitière, intervalle vêlage-premières chaleurs… « Ces tests apportent des informations sur 13 caractères morphologiques et de qualités maternelles. Ils permettent de faire des choix basés sur la génétique, qui ont un impact économique concret, que l’on peut chiffrer. »
« Un investissement qui paye »
Un test sur un mâle coûte environ 150 €, tandis qu’il se limite à 50 € pour les femelles. « C’est un investissement qui paye », affirme Solange Faurisson. Par exemple, sélectionner les animaux sur leur potentiel de croissance peut permettre de réduire le temps d’engraissement de 15 jours. Une économie de 750 € serait alors réalisée sur un lot de 20 broutards, dont les frais d’alimentation s’élèvent à 2,50 € par tête et par jour.
« Sur ce caractère de croissance, nous avons observé une différence de 69 grammes par jour sur le gain moyen quotidien entre les 30 % meilleurs broutards d’un échantillon de100 000 animaux,et les 30 % moins bons génétiquement », explique l’experte. Pour 15 kg de différence au total, les pertes peuvent s’élever à 49 € par animal au faible potentiel génétique, pour un prix de vente à 3,30 €/kg en moyenne pour un broutard limousin de 330 kg.
« Nous recommandons de tester les mâles dans un premier temps, car ils auront en moyenne plus de 60 descendants », explique Solange Faurisson. Cependant, de plus en plus de tests sont réalisés sur les femelles, avant de faire le tri au sevrage. « Maîtriser l’intervalle vêlage-premières chaleurs grâce à la génomique peut permettre de gagner jusqu’à quatre jours, soit l’équivalent d’un veau gagné par an pour un cheptel de 100 vaches », chiffre-t-elle.
Faciliter le quotidien
Les gains peuvent aussi être estimés en temps et en facilité de travail. L’experte souligne l’importance d’anticiper certains critères physiques, comme la morphologie du pis. « Il permet de faciliter les premières tétées. Ne pas avoir besoin d’aider l’animal offre une meilleure qualité de travail à l’éleveur. » La génomique donnepar ailleurs accès à des informations surla descendance des animaux testés. Un potentiel génétique qui, normalement, demande quatre ans chez une femelle pour être estimé, et environ sept ans chez un mâle. Les tests Iboval — principalement basés sur les parents du bovin — sont complémentaires aux tests EvaLiM.
« L’index Iboval aide plutôt au choix d’accouplement ou du taureau d’insémination artificielle. Les tests génomiques, eux, permettent de sélectionner les animaux au sevrage, avant même qu’ils aient produit une descendance. » Enfin,la génomique est un outil de prévention desanomalies génétiques. Un animal porteur peut coûter 1000 € de pertes à l’éleveur en cas de mortinatalités.