« Déléguer notre alimentation […] est une folie », affirmait le président Emmanuel Macron dans son discours du 12 mars 2020, invitant à reconstruire une indépendance alimentaire. Le syndicat des producteurs de légumes de France s’est dit prêt à relever le défi, le 8 décembre 2020, lors d’une conférence de presse.

Augmenter notre autosuffisance

L’Hexagone n’est autosuffisant qu’à 50 % en légumes. Jacques Rouchaussé, le président de Légumes de France, a déploré le manque « de fléchage » pour la filière dans le plan de relance et appelle le gouvernement « à prendre en compte [ses] spécificités ».

 

Alors que les surfaces françaises de productions légumières reculent et que la part des importations augmente, le syndicat a rassemblé dans son livre blanc des propositions concrètes pour développer sa filière et s’est fixé deux objectifs forts : une autosuffisance à 60 % d’ici à 2022, et à 70 % à l’horizon de 2025.

Mettre fin aux distorsions de concurrence sur le plan social

La filière représente en France 200 000 emplois en équivalent temps plein. Le syndicat dénonce la « forte distorsion de concurrence entre les voisins européens » sur le coût du travail notamment, estimé à 12 € net par heure pour un saisonnier. Il propose donc :

  • À moyen terme, l’harmonisation et la convergence des réglementations européennes sur le coût du travail et la flexibilité ;
  • À court terme : plus de flexibilité dans la réglementation sur l’aménagement du temps de travail pour coller aux variations climatiques ;
  • Une simplification administrative ;
  • L’exonération du versement transport ;
  • La pérennisation de l’exonération de charge pour les travailleurs occasionnels (TODE), que la filière a obtenue pour deux ans, et son extension aux salariés permanents.

Gagner en compétitivité

Pour Légumes de France, « il faut créer de l’attractivité dans ses filières » en incitant l’installation des jeunes, et favoriser la reprise. Il propose pour cela :

  • Des aides représentatives à l’installation, un accompagnement financier et une amélioration de la fiscalité les premières années d’exploitation ;
  • Accompagner les investissements pour la modernisation des outils de production ;
  • Des programmes spécifiques d’accompagnement pour la filière ;
  • Un dispositif de suramortissement pour le renouvellement du matériel ;
  • Un accompagnement des producteurs dans la transition, pour le volet de l’économie d’énergie.

Soutenir la recherche sur la protection des cultures

« Bio ou conventionnels, les producteurs doivent disposer de solutions pour protéger leurs productions », rappelle le syndicat. La filière estime avoir été attentive aux attentes sociétales, et avoir su améliorer ses pratiques, parfois au détriment de la compétitivité vis-à-vis de voisins européens.

 

« Quand il n’y a pas d’alternatives, disposer d’une solution devient une arme redoutable pour nos concurrents. Les distorsions entre producteurs européens se traduisent toujours par la disparition des surfaces et le renfort des importations », poursuit-il.

 

Légumes de France propose :

  • De disposer d’une réglementation claire, précise et harmonisée au niveau européen ;
  • De simplifier l’accès aux autorisations de mise sur le marché (AMM) en supprimant le « double zonage sud et nord imposé à la France qui pénalise les petites filières » ;
  • Que les décisions françaises prennent en compte les distorsions de concurrence entre les États membres ;
  • Un soutien des projets de recherche pour nouvelles solutions. « La RPD (redevance pour pollution diffuse) ne doit pas servir qu’à entraver la compétitivité de nos exploitations, elle doit servir d’accompagnement dans le changement. »

Renforcer l’appui technique en Outre-mer

Le syndicat s’est doté l’année dernière d’une antenne Antilles-Guyane et propose notamment une consolidation des emplois agricoles, une exonération de charges supplémentaire pour le producteur qui embauche dans le cadre de groupements d’employeurs.

 

Il demande aussi un renforcement de l’appui technique, en créant une antenne du CTIFL, pour travailler sur de nouvelles variétés adaptées aux contraintes du climat.

 

Julien de Normandie, le ministre de l’agriculture, a salué l’engagement de la filière, « maillon essentiel de la souveraineté alimentaire », en particulier durant la crise et a assuré sa « pleine mobilisation ».

 

« Manger des produits frais et locaux, c’est ce qu’il y a de mieux pour notre santé, mais aussi pour notre économie, notre environnement et notre portefeuille, conclut-il. Il n’y a pas de pays fort sans une agriculture forte. »