Après la Confédération paysanne et la Coordination rurale, c’était au tour de la FNSEA, le mardi 30 avril 2024, de partager son avis sur les raisons de la perte de souveraineté alimentaire française auprès de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale.

Une définition large

Alors que la notion de la définition même de la souveraineté alimentaire est au cœur des discussions avec les organisations auditionnées, la FNSEA, par son président Arnaud Rousseau, défend une définition « large » du terme.

« La souveraineté commence par l’acte de la production », un terme qui « ne se trouve pas dans l’article 1 du projet de loi d’orientation et d’avenir agricole », regrette le président du syndicat.

Pour lui, la souveraineté alimentaire doit passer par une logique de création de valeur, via l’instauration et le maintien de filières qui permettent de continuer à produire. Parmi celles-ci, le lin, la betterave, la laine ou les protéines pour alimenter les animaux sont en première ligne.

En ce qui concerne le « périmètre » de la souveraineté alimentaire, le président de la FNSEA voit large, au-delà des frontières. Contrairement à d’autres syndicats, la FNSEA défend non pas une « vision d’autarcie, mais une dimension plus large avec une dimension d’échange à l’échelle de la planète ».

Intérêt de l’international

« Les questions se centrent autour de l’autoconsommation, observe Arnaud Rousseau, mais nous avons une responsabilité sur la planète. » Et de prendre l’exemple des pays de l’Afrique subsaharienne, qui en raison du climat ou des difficultés d’établir des filières, dépendent en partie de l’exportation française.

Dans ce cadre, le président de la FNSEA défend une « vision offensive » de la souveraineté alimentaire face à d’autres pays comme la Russie qui s’engage sur l’exportation de céréales. « Il faut aussi qu’on comprenne l’enjeu géopolitique de la question alimentaire qui dépasse le cadre national. »

Raisonner seulement au niveau national est risqué, selon le céréalier. Si on ne recherche que l’autosuffisance, sans chercher à développer l’exportation, « on se réveille un matin en étant déficitaire », alerte Arnaud Rousseau.

Importations

Si Arnaud Rousseau défend la vocation exportatrice de la France, il reste plus prudent en ce qui concerne le libre-échange. « On souhaite un niveau de contrôle et d’exigence renforcé » sans parler de « protectionnisme », tempère-t-il. La réciprocité des normes doit aussi s’effectuer au niveau intra-européen, selon lui.

Le patron de la FNSEA soutient l’idée d’un « objectif d’harmonisation complète et totale de l’Union européenne pour lutter contre la compétition intracommunautaire », notamment sur les interdictions des produits phytosanitaires.

La souveraineté alimentaire, ne « se départit pas des autres défis de l’agriculture » que sont « le renouvellement générationnel, le changement climatique et la décarbonation de l’activité agricole ». Ces deux derniers défis apparaissent même complémentaires avec la souveraineté alimentaire dans un objectif de relocalisation des productions.

« Aujourd’hui sur un certain nombre d’engrais de base, on est dépendants », observe le président de la FNSEA. La décarbonation nécessitera que demain nous fassions des engrais décarbonés, (en France, NDLR) ». Alors que la France mise sur l’agriculture pour se décarboner, « qui va payer ? » interroge le céréalier francilien. « Il faudra des moyens, si personne ne veut la financer, le monde agricole ne pourra pas le faire. »

Prix minimums

Quant à l’instauration d’un revenu décent pour les agriculteurs, pierre angulaire pour attirer les jeunes générations, le syndicat majoritaire rejette l’idée de prix plancher. « Si on fixe un prix supérieur à la réalité du marché, les acheteurs iront ailleurs », craint Arnaud Rousseau. Dans le cas inverse, si les prix du marché augmentent, les agriculteurs ne bénéficieraient pas de la hausse, selon lui.

« On ne peut pas être sur un marché complément libéralisé. Il faut un cadre, mais pour autant on ne veut pas de chose administrée », résume-t-il.