La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a pris des mesures fortes concernant l’éradication de la dermatose nodulaire contagieuse (DNC). Les plus marquantes sont notamment l’interdiction de l’exportation d’animaux vifs depuis tout le territoire national, ainsi que la fermeture des marchés aux bestiaux dans les Régions Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie.
« Que la pression soit accentuée auprès de ceux qui ne respectent pas les règles en zone réglementée nous paraît logique, affirme Patrick Bénézit, président de la Fédération nationale bovine (FNB). Mais nous ne comprenons pas la stratégie de la ministre [de] bloquer le commerce. »
Menaces de mobilisations syndicales
Alors que la FNB espérait une sortie des broutards valablement vaccinés depuis les zones réglementées, cette décision ministérielle fait mouche. « Nous avons une demande très claire, que la ministre renonce à ce projet dans l’immédiat ! », affirme Patrick Bénézit. Dans un communiqué de presse diffusé le 17 octobre, la FRSEA et JA Auvergne-Rhône-Alpes menacent de « se mobiliser de manière très forte dans les heures et jours qui viennent si la ministre de l’Agriculture ne revient pas immédiatement en arrière ».
Le Modef abonde dans ce sens et « refuse la décision prise par la ministre de l’Agriculture […] de fermer les marchés à l’exportation pour 15 jours, dans un communiqué de presse du 17 octobre. Cette décision est incompréhensible ». Le Modef craint une « baisse des prix [du broutard] à partir du 5 novembre », la potentielle levée des restrictions actuelles. Le communiqué dénonce une « mauvaise stratégie sanitaire engagée par le gouvernement », notamment concernant l’abattage total mais également la vaccination. « La ministre aurait dû anticiper le déploiement massif de la vaccination plutôt que de suspendre les exportations de bovins. »
Le seul pilier « perfectible » de la stratégie
Parmi les trois piliers que sont le dépeuplement des foyers, la vaccination des animaux en zone réglementée et la gestion des mouvements, c’est ce dernier facteur qui semble faire défaut dans la stratégie gouvernementale. En ce qui concerne les investigations sur l’origine de la contamination des derniers cas de DNC en territoires indemnes (dans les Pyrénées-Orientales, le Rhône et le Jura), Kristel Gache, la directrice de la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire (GDS), confirme qu’il s’agit de déplacements de bovins, « faits de façon légale avant la mise en place des restrictions, ou des mouvements illégaux, mais probablement les deux. Dans tous les cas, ce sont les mouvements sur lesquels on doit mettre nos efforts et qui aujourd’hui mettent en péril la situation ». Concernant la vaccination, la stratégie d’immuniser uniquement les animaux en zone réglementée reste intacte. Pour Kristel Gache, la vaccination fonctionne, c’est bien le volet des mouvements d’animaux de la stratégie qui reste perfectible.
L’interdiction des exportations de bovins vifs depuis tout l’Hexagone jusqu’au 5 novembre révolte les syndicats, et pourtant, les sanctions auraient pu être plus sévères. « Bruxelles attendait de la France des mesures fortes, affirme Kristel Gache. La décision aurait pu nous être imposée par la Commission européenne, pour éviter la diffusion [de la DNC] dans d’autres États membres. Il vaut mieux maîtriser les mesures et leur durée. » Cette interdiction de 15 jours risque cependant d’être prolongée, si de nouveaux cas de dermatose nodulaire sont détectés dans des territoires indemnes, par exemple. « Il y a eu trop de foyers en peu de temps sur des territoires indemnes, rappelle la directrice de GDS France. Il faut une responsabilisation de tout le monde, car quand il y a quelques trous dans la raquette, on le paye tout de suite. »
Risque de perdre ses indemnités lors d’un non-respect des règles
En plus d’un contrôle routier renforcé, les indemnisations peuvent également servir de moyen de pression. Si un élevage est déclaré foyer, mais que l’éleveur n’a pas respecté les mesures en place, c’est-à-dire un mouvement d’animaux illégal ou un refus de vaccination au sein d’une zone réglementée, il pourrait se voir refuser son droit d’indemnisation.
Du côté de la Fédération des marchés de bétail vif (FMBV), les principaux concernés par la fermeture des marchés aux bestiaux en Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie, la réaction est sans appel : « Nous n’avons même pas été invités à la réunion du CNOPSAV, déplore Bruno Debray, président de la FMBV. Je trouve cela désolant, car nous faisons partie de la filière. Les marchés vont fermer, nous aimerions être au courant de ce qu’il se passe ! »