Les quatre cas confirmés dans la nuit du 10 au 11 juillet 2025 portent à 14 le nombre total de foyers de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) connus en France ce vendredi 11 juillet 2025, 12 jours après le premier foyer déclaré à Entrelacs, en Savoie.
« Situation inédite »
Devant la centaine d’éleveurs venus à cette cinquième réunion organisée sur le sujet dans l’Ain, Romain Persicot, ingénieur-conseil au GDS, avoue son inquiétude face à une « situation inédite ». « Les semaines à venir seront décisives, alors je vous invite absolument à respecter toutes les mesures et recommandations de biosécurité. » Certaines ont cependant du mal à passer et des voix s’élèvent, notamment du côté de la Confédération paysanne et du Modef, pour les contester.
Cette maladie transmise par les insectes hématophages est classée « catégorie A » : normalement absente du territoire européen et particulièrement grave, elle tombe sous le coup d’une réglementation communautaire. Celle-ci impose le dépeuplement immédiat et sur place des lots infectés et instaure une zone réglementée d’un rayon de 50 km, dont 20 km de « zone de protection ». Au 11 juillet, un seul foyer s’est déclaré hors de la commune d’Entrelacs, sur une commune adjacente en Haute-Savoie, étendant le périmètre réglementé de quelques kilomètres à l’est.
Mise sous cloche
En zone réglementée, les mouvements de bovins sont strictement interdits, comme les épandages de matière organique. Les cas dérogatoires sont rares (départ pour l’abattoir, mise-bas…) et soumis à la délivrance d’un laissez-passer sanitaire après visite du vétérinaire à la charge de l’éleveur. Lavage, désinfection et désinsectisation des véhicules sont indispensables. Aucune dérogation ne sera acceptée pour nourrir les animaux : « On ne les change pas de pâture, on affourage au champ », insiste la DDPP.
L’accès à l’élevage doit être limité aux personnes indispensables qui doivent avoir « mains propres, vêtements propres et bottes lavées et désinfectées, martèle Romain Persicot. Car le virus très résistant aux agents physiques et chimiques survit plusieurs semaines dans l’environnement, notamment les déjections. » La tenue d’un registre des entrées et sorties s’impose pour pouvoir remonter le fil d’une contamination si besoin.
La maladie n’étant pas une zoonose, aucune restriction ne s’impose sur les denrées alimentaires, lait ou viande. Des solutions sont recherchées pour les veaux et broutards dont le ramassage est stoppé, et pour les fosses à lisier pleines — une liste de produits pour désinfecter les effluents est en cours d’élaboration, selon la DDPP.
Dépeuplement total
Si certains jugent les mesures trop sévères, c’est l’obligation d’abattre les cheptels qui agite le plus. « Le virus ne survit que quelques heures sur la mouche mais plusieurs semaines sur un bovin infecté, qui pourra mettre jusqu’à un mois avant d’exprimer des signes cliniques : c’est une bombe à retardement, explique Romain Persicot. Il faut éliminer le réservoir du virus au plus vite, sachant qu’au sein d’un troupeau, la morbidité est évaluée à 90 %. »
D’où la nécessité d’abattre tout le lot infecté (mais pas tout le cheptel de l’exploitation si les autres lots sont éloignés) dès le premier cas confirmé même si les autres animaux semblent sains. « Un troupeau touché, de toute façon, aurait du mal à s’en relever », reprend-il. La mortalité est estimée à 10 % mais les nodules sur les muqueuses provoquent des difficultés respiratoires et digestives très graves. Dans le premier cas savoyard, les symptômes touchaient la moitié du troupeau à J + 7 (jour du dépeuplement), et la première bête touchée a été euthanasiée à J + 5 pour abréger ses souffrances.
Vaccination en ligne de mire
Dans la zone de protection des 20 km, les trois quarts des élevages ont déjà reçu la visite obligatoire du vétérinaire sanitaire, prise en charge par l’État. « Contrairement à l’Italie où les cas touchent plusieurs provinces, laissant penser à une dissémination par transport, les cas français sont circonscrits sur une zone restreinte, souligne la vétérinaire Karine Hauray. En bloquant les mouvements, on ralentit énormément la progression du virus, qui ne se propage que de proche en proche. Il faut le contenir jusqu’à ce que la vaccination le stoppe. »
Les services de l’État précisent que les doses de vaccin sont arrivées et promettent une mise en œuvre rapide. Prise en charge par l’État, la vaccination reposera sur une seule injection conférant une immunité pendant trois ans. La stratégie vaccinale en cours d’élaboration pourrait être dévoilée dès la semaine prochaine, d’après une source proche du dossier.