« On digère les rumeurs d’achat chinois de soja, et c’est ça qui crée de la volatilité et un peu de fermeté sur les prix notamment sur les marchés américains. Par effet d’entraînement, cela aide un petit peu le marché européen à se tenir », résume Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France.
La Chine a acheté du soja américain
Selon la Maison Blanche, Pékin a accepté d’acquérir au moins 12 millions de tonnes de soja américain sur les deux derniers mois de 2025, puis 25 millions par an, dans le cadre du règlement du conflit commercial entre les deux pays. Dans l’immédiat, environ 1,5 million de tonnes ont été vendues, dont près de 1 330 000 tonnes confirmées par le ministère américain de l’Agriculture (USDA).
À la Bourse de Chicago, les prix du blé, du soja et du maïs ont fini en hausse sur une semaine ce mercredi 19 novembre 2025, malgré un recul après la sortie vendredi des très attendues prévisions mensuelles de l’USDA sur l’offre et la demande agricoles. Ce rapport Wasde, sorti après un mois et demi de paralysie budgétaire du pays, prévoit notamment une récolte américaine record de maïs.
Ce rapport revoit aussi à la baisse les perspectives d’exportation de soja en dépit de l’accord sino-américain, de quoi affecter temporairement le cours des deux graines. Pour Dewey Strickler, analyste pour Ag Watch Market Advisors, la vente des quelque 800 000 tonnes de soja officialisée lundi, « est bien inférieure » aux 12 millions annoncés d’ici à la fin de l’année.
« Il s’agit probablement davantage d’un geste de sympathie qu’autre chose » de la part de Pékin, estime-t-il. « La Chine ne fera probablement pas grand-chose tant qu’elle n’aura pas vu comment la Cour suprême se prononce sur la légalité des droits de douane imposés par l’administration Trump ».
De la même manière, « le marché restera dans l’expectative jusqu’à ce que (la Cour) rende sa décision », avance-t-il. La Cour suprême examine actuellement la légalité des surtaxes, imposées à de nombreux pays par le président Donald Trump alors que ce sujet relève de la compétence du Congrès.
Une bonne demande de maïs
Les marchés surfent aussi sur une bonne demande de maïs. « La demande de maïs, comme nous l’avons vu avec les inspections à l’exportation, a été excellente. La Chine ne va pas acheter de maïs, mais ce n’est pas un problème », estime Jack Scoville, de Price Futures Group.
En outre, « habituellement, les cours atteignent un sommet avant Thanksgiving » puis reculent légèrement jusqu’à la fin de l’année : « Les fonds retirent leur argent et se préparent pour l’année suivante », explique l’analyste qui, sauf « actualité suffisamment lourde », s’attend à ce que cette année ne déroge pas à la règle.
Le marché européen du blé soutenu par la « bonne demande portuaire »
Du côté européen, la stabilité l’emporte. Le marché du blé européen profite d’une « bonne demande portuaire » du Maroc, de l’Égypte, mais aussi du Bangladesh ou de la Thaïlande, relève Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage. L’Europe a récolté de bons volumes mais doit faire avec l’arrivée de moissons abondantes de l’hémisphère Sud (Argentine et Australie).
La concurrence du blé russe, dont le prix n’a pas baissé, pour l’instant ne joue pas trop, souligne Damien Vercambre. L’expert constate aussi « une bonne demande » de maïs français et notamment alsacien, l’Ukraine étant pour sa part en retard sur ses récoltes, mais le maïs américain, attendu en abondance, devrait in fine faire pression sur les prix.