Sur cette campagne, la présence de la Russie à l’exportation en blé est « massive », avec des niveaux « jamais connus auparavant », a prévenu Marc Zribi, chef de l’unité des grains et du sucre de FranceAgriMer, ce 13 septembre 2023 à l’issue du conseil spécialisé des grandes cultures.
Récolte record
Dans son rapport publié le 12 septembre 2023, l’USDA (ministère américain de l’Agriculture) maintient à 85 millions de tonnes la production de blé russe en 2023, mais les opérateurs et analystes attendent plus : 90 millions de tonnes, voire au-delà, selon les instituts, rapporte Marc Zribi. Le potentiel des exportations de la Russie serait ainsi historique, autour de 50 millions de tonnes. « Les chiffres de l’été le montrent déjà, avec des niveaux d’exportations de l’ordre de 4 à 5 millions de tonnes par mois », appuie le spécialiste.
« La Russie représente aujourd’hui près de 30 % des exportations mondiales de blé, si l’on exclut le blé dur des prévisions mondiales de l’USDA », rapporte Marc Zribi. En Égypte, sur 1,4 million de tonnes de blé achetées par l’autorité gouvernementale en charge des achats de céréales (Gasc) au 6 août 2023, 71 % provenaient de la Russie. La France a, quant à elle, réalisé deux bateaux vers cette destination lors du dernier appel d’offres du 30 août 2023, soit 120 000 tonnes. Face à l’origine mer Noire très présente, les transactions sont faibles pour les origines européennes sur Euronext.
Pression baissière sur les prix
La Russie a ainsi le potentiel pour être présente et peser sur le marché tout le long de la campagne, et pas uniquement sur la première partie. Et pour exercer une pression baissière sur les prix! Un élément qui pourrait équilibrer cette pression serait, pour Marc Zribi, la confirmation de prévisions de récoltes de blé moins importantes en Australie ou en Argentine.
En Ukraine, la production de blé est attendue à 20 millions de tonnes, avec un potentiel à l’exportation de près de 13 millions de tonnes. Les exportations de céréales sont entravées depuis la fin du corridor maritime. « La situation est compensée en partie par l’utilisation des ports fluviaux qui est passée de 39 à 65 %, mais le passage par ces ports renchérit aussi les coûts de logistique », note Marc Zribi.
Au niveau mondial, l’Égypte, la Chine et l’Indonésie devraient rester les principaux acheteurs de blé en 2024. La Turquie passe au quatrième rang, grâce à une bonne récolte.
Bilans tendus en blé dur et en orge
En blé dur, le bilan mondial est extrêmement tendu, « le plus tendu depuis 20 ans », relève Marc Zribi, en lien avec la production canadienne très dégradée par les conditions climatiques sèches. La production mondiale est attendue à 30,6 millions de tonnes par le Conseil international des céréales (CIC), en baisse de 7 % sur un an.
La production d’orge est également en baisse de 6 % sur un an, à 141,9 millions de tonnes, avec un stock final prévu historiquement bas à 17,4 millions de tonnes, largement inférieur à la moyenne quinquennale (20,5 millions de tonnes). À noter que la reprise des relations entre la Chine et l’Australie devrait avoir un impact sur les exportations françaises d’orge vers la Chine, mais moins important qu’initialement prévu. Les perspectives de récolte en Australie ont été revues à la baisse, et les orges australiennes ont perdu en compétitivité face aux orges françaises.
Disponibilités importantes en maïs
Le CIC table par ailleurs sur une production mondiale de maïs à 1 214 millions de tonnes, avec une hausse de la récolte attendue en Ukraine et au Brésil, et une baisse aux États-Unis. Les disponibilités importantes, notamment au Brésil, pèsent sur les cours de la céréale, malgré une baisse de production attendue en Argentine.
Le Brésil est passé au premier rang mondial des exportateurs de maïs, devant les États-Unis. L’Argentine et l’Ukraine restent également parmi les principaux fournisseurs de maïs sur le marché mondial. Avec une production attendue à 27 millions de tonnes de maïs, l’Ukraine pourrait exporter 21 millions de tonnes.
Le Brésil a exporté 8,7 millions de tonnes de maïs au mois d’août, « soit 56,5 % de plus que la moyenne quinquennale, et un niveau record pour le mois d’août », informe Marc Zribi. Le Chine est le premier acheteur du Brésil (28 %), suivi par le Japon (18 %), le Vietnam (12 %) et la Corée (10 %).
« La position à l’exportation des États-Unis s’est un peu dégradée », indique Marc Zribi. Les exportations américaines ont atteint 2,9 millions de tonnes au mois d’août, un plus bas niveau depuis neuf ans, à cause des conditions climatiques sèches. Selon l’USDA, la moitié de la production de maïs aux États-Unis se situe dans les zones touchées par la sécheresse.