La bonne récolte et les exportations russes continuent d’influencer le marché du blé à la baisse, tandis que des inquiétudes temporaires sur la récolte de maïs aux États-Unis ont maintenu les prix de la graine jaune. Les prix du colza baissent sous influence d’une récolte plutôt bonne dans l’hémisphère Nord.

Blé : l’offre russe continue de faire pression sur les prix

En une semaine, les prix des blés se sont affaissés pour la plupart des origines. Le blé rendu Rouen est revenu à son niveau de la mi-août, perdant 9 €/t en une semaine, à 221 €/t (base : juillet). Le blé tendre rendu La Pallice baisse également, à 221,5 €/t. Le dernier appel d’offres de l’Égypte de 240 000 tonnes marque un regain de compétitivité de l’origine française qui a remporté une part des 120 000 tonnes pour un prix Fob de 259 $/t. La Roumanie a remporté les 120 000 tonnes restantes pour un prix Fob de 261 $/t.

Pour une fois, l’origine russe n’a pas été retenue puisqu’elle s’affichait à 270 $/t Fob, un seuil officieux voulu par les autorités russes. Cela n’empêche pas les exportations russes d’avoir été extrêmement élevées depuis le début de la campagne. Entre le 1er et le 29 août, la Russie a exporté 4,7 millions de tonnes de blé, ce qui pourrait laisser présager d’un nouveau record sur l’ensemble de la campagne. Ses blés devraient garder une certaine compétitivité, d’autant plus que la récolte s’avère meilleure que prévu : elle pourrait avoisiner les 90 millions de tonnes, soit le deuxième meilleur niveau jamais atteint.

De son côté, l’Ukraine parvient toujours à exporter malgré la fin du corridor maritime. Les exportations par voie terrestre vers la frontière ouest sont en hausse, tandis que les ports du Danube fonctionnent toujours malgré des perturbations. L’Ukraine a ainsi exporté 870 000 tonnes de blé entre le 1er et le 23 août, contre 520 000 tonnes l’an dernier sur la même période.

Pour faciliter les exportations ukrainiennes, le commissaire européen à l’Agriculture a demandé le versement d’une aide à hauteur de 30 €/t pour 20 millions de tonnes de graines ukrainiennes. Cette aide vise à compenser les surcoûts logistiques subis par les transporteurs ukrainiens liés au transit vers les ports de l’Union européenne. Cette subvention ne serait valable que si l’interdiction d’importations de grains ukrainiennes pour les pays de l’Est communautaire (Pologne, Hongrie, Roumanie, Slovaquie et Bulgarie) est prolongée au-delà du 15 septembre, et ce, afin de n’autoriser que le transit via ces pays.

Quelques facteurs haussiers sont à suivre sur le marché du blé. En Australie, les conditions de croissance des blés d’hiver se sont dégradées. Les effets du phénomène El Niño se font maintenant sentir puisque les pluies se font de plus en plus en rares, alors que les blés sont au milieu de leur cycle. Au Canada, l’organisme officiel StatCan confirme une récolte affectée par la sécheresse avec 29,5 millions attendus (blé tendre et dur), contre 34,3 millions de tonnes l’an dernier.

Maïs : les prix se maintiennent

Depuis une semaine, le maïs Fob Bordeaux a gagné 2 €/t, pour atteindre 210 €/t (base : juillet, récolte : 2023). Le maïs Fob Rhin a, quant à lui, perdu 2,5 €/t, rejoignant ainsi le maïs Fob Bordeaux. 40 % des surfaces de maïs français avaient atteint le stade de 50 % d’humidité des grains au 28 août, selon FranceAgriMer, contre 48 % en moyenne ces cinq dernières années.

FranceAgriMer juge également que 82 % des parcelles sont dans un état bon à très bon. Il semble acté que la récolte sera meilleure que l’an dernier. Mais les fortes chaleurs de la fin d'août sur la moitié sud du pays devraient avoir bridé les potentiels de rendement. La récolte française pourrait peiner à atteindre les 11,5 millions de tonnes, également amoindrie par une faible surface.

Le maïs américain Fob Gulf a gagné 14 $/t, à 226 $/t. Les maïs américains ont réagi à la publication des derniers « crop-ratings » de l’USDA. En effet, les maïs jugés dans un état bon à excellent sont passés de 58 à 56 %. Il faut y voir les effets des fortes températures de la mi-août. En outre, des températures élevées sont de nouveau attendues dans les prochains jours. Cela n’empêche pas la récolte américaine d’être prévue en hausse par rapport à l’an dernier grâce à une surface élevée. Les prix du maïs sont donc toujours sous l’influence d’une certaine pression liée à la hausse de la récolte mondiale.

Hormis les États-Unis, la récolte ukrainienne devrait être plutôt bonne malgré la faible surface. Le marché du maïs voit toujours arriver de forts volumes en provenance du Brésil, avec un rythme d’exportation record en août. Les exportations continuent également depuis l’Ukraine avec 710 000 tonnes expédiées entre le 1er et le 23 août. À l’instar du blé, les exportations par voie terrestre vers la frontière ouest sont en hausse, tandis que les ports du Danube fonctionnent toujours malgré des perturbations.

Le prix du colza diminue

L’avancée des récoltes au Canada, des disponibilités correctes dans l’Union européenne et des offres de colza ukrainien rendu Union européenne à des niveaux attractifs pour les triturateurs ont tiré les prix du colza vers le bas cette semaine. Le prix du colza rendu Rouen a perdu presque 5 €/t sur une semaine, pour atteindre 460 €/t. Le prix Fob Moselle perd 5,5 €/t, et se place à 466 €/t au 31 août.

Sur le marché canadien, les récoltes progressent, avec 10 % des champs de canola moissonnés au Saskatchewan, et 5 % au Manitoba à la fin d'août. De nouveaux volumes arrivent sur le marché, ce qui pèse sur les prix. Au début de la semaine, Statcan a publié une nouvelle estimation de la production de canola canadienne, à 17,56 millions de tonnes. Cela confirme que la cuvée de 2023 sera en recul par rapport à 2022. En même temps, cet organisme statistique a revu en hausse de 500 000 tonnes environ les récoltes des deux dernières campagnes, ce qui implique des stocks de report de la fin de la campagne de 2022-2023 plus élevés qu’attendu.

En parallèle, la récolte ukrainienne s’est confirmée à un niveau record, proche voire au-dessus des 4 millions de tonnes, et cette origine se place ainsi à des niveaux plus attractifs que les colzas locaux. Les triturateurs n’ont guère de difficulté à couvrir leurs approvisionnements à l’heure actuelle. La concurrence entre les différentes origines disponibles contribue ainsi à la baisse des cours. À cela s’ajoute le renforcement de la parité euro/dollar, qui rajoute un élément baissier aux prix français.

Repli des cours du tourteau de soja cette semaine après une forte hausse

Après avoir atteint un sommet la semaine dernière, le prix du tourteau de soja a reculé entre le 25 août et le 1er septembre. À Montoir-de-Bretagne, il a perdu 12 €/t sur le rapproché, pour s’afficher à 500 €/t. Ce tourteau pâtit de la perte d’intérêt des fabricants d’aliments compte tenu de son prix élevé. Le tourteau de soja a en effet perdu en compétitivité face aux céréales ces dernières semaines et voit son incorporation dans les rations animales fortement limitée.

Par ailleurs, la demande animale au sein de l’Union européenne demeure faible du fait de la diminution des cheptels porcin et avicole. La baisse des cours reste toutefois mesurée, atténuée par la possibilité de voir la production américaine se réduire. Si le manque de précipitations et les températures élevées se prolongent dans le Midwest pendant la phase critique de remplissage des gousses, cela pourrait compromettre le potentiel de rendement des plantes de soja.

Les conditions de culture se sont par ailleurs dégradées. Au 27 août, 58 % des champs étaient en état bon à excellent, contre 59 % une semaine plus tôt. Les précipitations prévues sur les deux prochaines semaines dans le Midwest semblent insuffisantes pour compenser le déficit hydrique. Les températures maximales devraient s’afficher au-dessus des normales de saison (de 33 à 38 degrés), à des niveaux potentiellement dommageables pour les rendements. Par ailleurs, les ventes hebdomadaires de soja américain restent dynamiques pour le moment, apportant un peu de soutien aux prix.

À suivre : évolution du conflit en mer Noire, parité de l’euro face au dollar, mesures de restriction d’importation de grains ukrainiens, météo en Amérique du Nord (maïs, soja), en Europe et mer Noire (maïs, tournesol), en Australie (blé, orge, colza) et en Argentine (blé, orge), production d’huile de palme en Asie du Sud-Est, conjoncture économique mondiale (croissance, inflation).