L’histoire. Calixte avait l’intention de vendre sa propriété. Il s’en était ouvert à son notaire qui, le 17 août 2010, conformément à la loi, avait notifié à la Safer les conditions de la vente projetée. Et notamment le prix demandé de 24 000 euros, en nature de landes. La Safer a répondu qu’elle entendait préempter, mais au prix de 9 300 euros. Il y avait donc désaccord sur le prix. Pour réaliser la préemption, il fallait que le tribunal de grande instance fixe le prix à retenir pour la vente, à moins que le vendeur ne retire son offre de vente dans les six mois. C’est ce qu’il fit, le délai de six mois ayant été respecté et le notaire ayant notifié à la Safer le retrait du projet de vente. Par la suite, Calixte a fait notifier par le notaire qu’il faisait donation à un tiers de la propriété en cause. Comme on pouvait s’y attendre, la Safer a demandé l’annulation de cette donation et l’exécution du projet de vente à elle notifiée.

Contentieux. Les débats se sont instaurés autour de l’article L. 143-1 du code rural, selon lequel il n’y a pas de droit de préemption sur les donations. Certes, la Safer en cause ne l’ignorait pas et c’est la raison pour laquelle elle en demandait la nullité. Il eût été plus simple que le débat s’instaurât sur la légitimité tant du vendeur que de la sienne de renoncer à la vente notifiée, comme ils en avaient le droit, à condition d’agir dans les six mois de l’acceptation de l’offre de vente. Or en l’espèce, le notaire avait légalement fait connaître à la Safer que le propriétaire renoncerait à la vente pour la remplacer par une donation. On rappellera que la Safer avait eu connaissance du projet de vente par la notification de ses conditions par le notaire. Devant cette évidence, une discussion aurait pu s’instaurer : y avait-il une véritable donation ? On comprend, quoi qu’il en soit, que la cour d’appel et la Cour de cassation aient rejeté le pourvoi formulé par la Safer, sauf sur sa prétention à bénéficier de dommages-intérêts. Sur ce point, la cour d’appel sera seulement censurée pour avoir accordé des dommages-intérêts au propriétaire.

Épilogue. À l’heure actuelle, la loi dit que le droit de préemption ne joue que sur les actes à titre onéreux. Mais qu’est-ce qu’un acte à titre onéreux ? Ne sommes-nous pas en présence d’une tentation pour le gouvernement d’accorder le droit de préemption par la Safer sur les donations ? Dans ce cas, il faudrait que la loi précise que la préemption serait limitée aux donations à des personnes étrangères à la famille jusqu’au quatrième degré.