L’histoire. La plupart des viticulteurs décident - ou sont obligés - de vendre leur vin en bouteilles de verre. Que ce soit eux ou un intermédiaire qui se charge de l’embouteillage, la vision des bouteilles dans les rayons des grandes surfaces ou chez les simples marchands de vin est suffisante pour entraîner le désir d’achat pour le client. On n’en est plus à l’emballage classique, sauf peut-être pour un vin de moins de dix degrés... Aussi, dès qu’un viticulteur prétend mettre sur le marché une qualité et une notoriété reconnues, la bouteille de verre est indispensable. Il y attache une importance capitale par sa forme et sa présentation. Evidemment, cette situation n’est pas valable pour le producteur qui vend son vin en gros. Telle était la situation de Jacques. Dans les bouteilles vides achetées pour faire son embouteillage, il avait constaté la présence de particules de verre, certes infime, mais gênante pour la consommation humaine. Ces faits ont été portés à la connaissance du vendeur de bouteilles.
Le contentieux. Une action judiciaire a été engagée contre le fabricant. Lors de l’expertise des bouteilles vides ou pleines, le technicien pouvait difficilement ignorer cette présence de fibre de verre… Le mandataire de justice avait constaté que le vin embouteillé était de mauvaise qualité, d’où sa conclusion : la vente était impossible. Aussi, la cour d’appel, après cette expertise, a retenu que les défauts relevés constituaient un préjudice économique pour ces bouteilles invendables. L’affaire a été soumise à la Cour de cassation. Un nouveau texte est apparu, issu de la loi du 18 mai 1998, qui décide des dommages causés par un défaut du produit, qu’il soit ou non l’objet d’un contrat. Précisément, l’article 1386-1 du code civil stipule que « le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu’il soit ou non lié par un contrat avec la victime ». La Cour suprême relevant que le défaut constaté provenait de la poudre de verre, mais également de la mauvaise qualité du vin, a censuré la cour d’appel pour ne pas avoir utilisé la législation applicable. Elle a donc renvoyé l’affaire devant une nouvelle cour.
L’épilogue. Cette histoire judiciaire illustre la volonté du législateur d’aller dans les textes de loi jusqu’aux moindres détails, alors que les articles 1382 et 1384 du code civil avaient depuis des décennies, si ce n’est plus, rempli leur mission sans discussion possible autour de la responsabilité civile. Nous en sommes parvenus à un point où chaque conflit doit avoir sa législation propre. En toute circonstance judiciaire, l’avocat doit être au courant de la loi nouvelle.