L’histoire. L’affaire se passe dans la région montagneuse de Corse-du-Sud. Ange et Léone avaient conclu en 1997 une convention de pâturage sur les herbages appartenant au premier. C’était un bon moyen juridique pour confier ces pâturages à des bergers... À l’origine, les conventions pluriannuelles dans un bail à métayage permettaient aussi au propriétaire d’échapper à l’impôt sur la fortune (ISF), mais les règlements fiscaux et l’interprétation des arrêts de la Cour de cassation ont amené l’abandon de cette pratique. Selon les règles en vigueur, la convention doit durer cinq ans et ne pas dépasser un loyer fixé par l’autorité préfectorale. Dans les mois à venir, chaque région devra publier un arrêté régional portant réglementation du contrat de convention pluriannuelle. Pour l’instant, on attend celui de la région Corse... Dans la présente affaire, vu l’arrêté préfectoral en vigueur au moment des faits, le loyer convenu avait été réduit pour entrer dans le cadre légal. Mais avec les années, il y avait à faire des travaux sur les bâtiments existants, ainsi que des terrassements. C’est là qu’est né le conflit.

 

Le contentieux. Ange s’opposant au financement des travaux, le fermier a soulevé la fausse qualification du contrat, disant qu’il s’agissait d’un bail à ferme et non d’une convention pluriannuelle. Son raisonnement était simple : s’il s’agit de la convention pluriannuelle, le propriétaire peut imposer au bénéficiaire de la convention de participer financièrement aux travaux, alors que, dans le fermage, le locataire ne doit supporter aucune charge de travaux fonciers.

La motivation de la cour d’appel était assez sommaire pour retenir le bail à ferme : « Faute pour les bailleurs d’établir les critères constitutifs de la convention pluriannuelle de pâturage alléguée, ces conventions relèvent en réalité du statut du bail à ferme. » En présence de ce contrat imposé par la cour d’appel, le locataire a soutenu la nullité du congé donné par Ange, en application de l’article L. 411-47 du code rural. Mais la Cour de cassation a été saisie. Son arrêt est extrêmement méritoire : elle a cassé, en disant qu’il incombait au preneur d’établir devant les juges que les conventions, expressément adaptées en application d’une législation particulière, devaient être requalifiées et que les conventions pluriannuelles de pâturages pouvaient prévoir des travaux d’aménagement, d’équipement et d’entretien à la charge de chacune des parties.

 

L’épilogue. En région de montagne, la convention pluriannuelle est plus ou moins adaptée. Il faut reconnaître que devant les tribunaux paritaires corses, elle est facilement adoptée. En revanche, il semble difficile de l’appliquer en pays de plaine. La mixture métayage et convention pluriannuelle, autrefois très souvent retenue, n’a plus beaucoup de chance de prospérer…