C’est un record historique : la France a enregistré entre dimanche et lundi sa nuit la plus froide depuis 1947 pour un mois d’avril, selon Météo-France. Le gel a touché une large partie de l’Hexagone, avec des températures sous la barre des –5°C dans plusieurs départements. Mais que ce soit pour l’arboriculture ou pour les grandes cultures, le chiffrage des dégâts n’est pas encore établi.
> À lire aussi : « Il est encore trop tôt pour cerner les dégâts du gel » (04/04/2022)

Prudence sur les estimations
« Il est trop tôt pour faire des estimations des dégâts en arboriculture, signalait Stéphanie Prat, la directrice de la FNPF (1) le lundi 4 avril 2022 à La France Agricole. Nous sommes en train de faire le recensement. C’est un petit peu plus hétérogène que l’année dernière tout de même, ce qui pourrait laisser envisager un peu plus d’optimisme. »
Daniel Sauvaitre, le président de l’ANPP (2), ne se prononce pas non plus pour le moment sur les pommes. Car au-delà des variations de températures observées d’une zone de production à l’autre, voire à quelques kilomètres de distance, d’autres facteurs entrent en jeu.
« La meilleure protection contre le gel est l’apport d’eau par aspersion mais il faut avoir des stocks d’eau importants et tous les producteurs n’ont pas cette possibilité, détaille-t-il. Les autres solutions (comme les bougies) sont moins efficaces, surtout à ces températures. Au final, ce qui nous sauvera peut-être, c’est le stade moins avancé des pommiers. »
Stade petit fruit atteint pour les prunes et les abricots
En prune, le constat est plus délicat : « Des parcelles peu habituées au gel ont gelé ce week-end, à des températures avoisinant les –4 à –5 degrés, alors que les pruniers ont atteint le stade petit fruit », constate Jean-Louis Sagnes de la chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne. Les perspectives sont « assez pessimistes avec une situation au moins aussi grave que l’année dernière ».
Un stade petit fruit aussi atteint par les abricots de la Drôme, mais sur une durée plus courte et avec des températures moins froides que l’année dernière. « Il y a eu aussi davantage de protection », indique Marion Bouilloux de la chambre d’agriculture de la Drôme. Dans les Baronnies néanmoins, les dégâts pourraient être plus conséquents car les températures sont descendues plus bas et plus longtemps que dans la vallée du Rhône.
Inquiétudes en céréales sur les zones précoces
Sur céréales, les observations des dégâts éventuels pourront commencer à la fin de la semaine ou au début de la semaine prochaine. « Il peut y avoir des dégâts foliaires, notamment sur les orges de printemps, et aussi des dégâts sur les épis, estime Jean-Charles Deswartes, d’Arvalis. Il faudra vérifier ensuite la mise en place de rattrapage avec les talles. »
Ses inquiétudes se portent surtout sur les zones les plus précoces, notamment dans l’Ouest et le Berry, là où les céréales ont pu déjà atteindre le stade 1 nœud/2 nœuds. « Il faut veiller à ne rien faire sur les cultures potentiellement affectées et surtout pas de régulateur, alerte-t-il. Il faut les laisser redémarrer et éviter tout risque de phytotoxicité. »
> À lire aussi : Le stade épi 1 cm des céréales a bien progressé en une semaine (04/04/2022)
Plus de peur que de mal en betteraves
La situation sur colza est moins alarmante qu’en 2021, selon Jean Lieven, de Terres Inovia. En effet, malgré des températures particulièrement froides dans le Grand Est, l’état sanitaire des cultures est meilleur que l’an dernier.
De plus, le colza a des capacités de compensation avec ses fleurs secondaires : « Nous avons quelques doutes tout de même dans les situations où le charançon de la tige n’était pas maîtrisé, mais cela ne va pas représenter de très grandes surfaces », précise Jean Lieven.
Enfin, plus de peur que de mal pour les betteraves malgré des pertes de pied envisagées dans les zones les plus gélives des champs, jusqu’à 30 % dans les parcelles, selon l’ITB (3). « Quelques resemis sont possibles mais on est loin de 2021 où environ 50 000 ha avaient été ressemés », signale l’ITB.
(1) Fédération nationale des producteurs de fruits.
(2) Association nationale pommes poires.
(3) Institut technique de la betterave.