L’histoire
Par actes des 31 mars et 19 avril 1995, Anne avait donné à bail à Maxime et à son épouse diverses parcelles de terre. Mais l’âge des preneurs avançant, par acte du 16 janvier 2020, Anne avait donné congé pour atteinte de l’âge de la retraite à Maxime et à son épouse, à effet au 30 septembre 2021.
Le contentieux
Souhaitant conserver un caractère familial à l’exploitation, Maxime et son épouse avaient saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation du congé et en autorisation de céder le bail à leur fille Camille.
Leur demande était juridiquement fondée sur l’article L. 411-64 du code rural qui autorise le preneur, évincé en raison de son âge, à céder son bail à son conjoint, ou à l’un de ses descendants. Et les conditions relatives à la situation du candidat à la cession, telles que ses aptitudes professionnelles, la possession du matériel nécessaire et la conformité au contrôle des structures, doivent s’apprécier à la date de la cession projetée. Pour les preneurs, la cession du bail à leur fille Camille devait être autorisée. Cette dernière avait vocation à utiliser le matériel acquis par la société à la disposition de laquelle le bail avait été mis, et la société avait sollicité une autorisation d’exploiter.
Mais le tribunal paritaire avait débouté les preneurs de leur demande de cession, au motif qu’ils ne justifiaient pas de la situation régulière de leur fille. Aussi, le congé avait-il pris effet au 30 septembre 2021, mettant fin au bail. Les preneurs avaient formé à nouveau leur demande de cession en cause d’appel. La situation de la cessionnaire ne devait-elle pas s’apprécier à la date de la cession projetée, soit le 24 mars 2022 lors la mise à disposition du bail au profit de la société.
La cour d’appel avait écarté la demande en relevant que le congé avait pris effet au 30 septembre 2021. Saisie par Maxime, la haute juridiction n’a pu que confirmer. La date de la cession projetée est, en cas de délivrance d’un congé pour atteinte de l’âge de la retraite, à défaut de manifestation de volonté contraire de la part des parties à la cession, la date d’expiration du bail, c’est-à-dire la date d’effet du congé.
Le congé ayant été délivré pour le 30 septembre 2021, les preneurs ne pouvaient valablement se prévaloir de la constitution le 24 mars 2022 d’une société d’exploitation agricole entre eux et leur fille, société bénéficiant d’apports en matériel et pour laquelle une autorisation d’exploiter n’avait été sollicitée que le 21 février 2022.
L’épilogue
La solution retenue peut paraître sévère pour Camille, qui ne pourra pas poursuivre la mise en valeur de l’exploitation familiale. Mais les preneurs n’ont-ils pas été quelque peu imprudents en s’abstenant d’anticiper la date de leur départ et de prendre les dispositions nécessaires avant la date d’effet du congé pour les soumettre à l’autorisation du juge ?