Dans le Lot, elle a son petit nom : l’esparcette. Le sainfoin est une légumineuse endémique, adaptée au terroir calcaire des Causses. « On reprend un peu ce que faisaient les anciens, et on tente de trouver des parades au changement climatique », témoigne Sandrine Rivière, éleveuse et présidente du groupement d’éleveurs ovins caussenards (Geoc).

Partenariat rémunéré

Cette coopérative a noué un partenariat avec les apiculteurs du département et a obtenu une réponse favorable au premier appel à projets du fond régénératif pour la nature initié par legroupe Kering (1), accompagné par l’ONG Conservation International. « C’est une démarche positive sur le plan environnemental et patrimonial, estime Théo Buerlé, technicien d’élevage. Il y a aussi une restitution financière aux éleveurs. »

Kering rémunère 1 450 euros l’hectare de sainfoin, pour trois ans (la durée de vie de la plante).Le projet finance également les semences (400 €/ha), ainsi que les analyses de fourrage et de biodiversité. Le tout, dans le cadre d’un contrat de prestations pour services environnementaux.

L’apport écologique du sainfoin est en effet indiscutable dans une rotation de cultures. Sans compter qu’il résiste bien à la sécheresse et aux excès d’eau, et s’avère peu gourmand en engrais et produits phytosanitaires. « L’an dernier, pour la première récolte de ce programme, j’ai obtenu dix tonnes de matière sèche par hectare, en trois coupes, sans engrais », se félicite Éric Cellié, l’un des éleveurs participants. « Et puis, on a des protéines dont l’empreinte carbone et le coût sont tout autres que le soja sud américain », se réjouit Sandrine Rivière.

Bonne conservation

Le Geoc trouve de nombreuses qualités nutritionnelles au sainfoin. Les éleveurs le donnent principalement aux brebis, principalement en préparation à la mise bas.

« On l’a fauché tard l’an dernier, en raison des nombreuses pluies, donc les valeurs du fourrage sont relativement moyennes : 91 % de matière sèche (MS), 0,7 UFL/kg de MS et 11 à 13 % de matière azotée. Globalement, le sainfoin est plus riche en énergie et plus équilibré que la luzerne, analyse Théo Buerlé. Les éleveurs sont également impressionnés par son appétence. »

Le risque de météorisation est minime en raison d’une forte teneur naturelle de tannins. « Avec la luzerne, l’apparition de ce trouble métabolique chez les brebis peut avoir des conséquences sur le fœtus. Par ailleurs, la luzerne se conserve moins bien, ce qui peut entraîner des soucis sanitaires, assure le technicien. Autant de problèmes évités avec le sainfoin. »

Quant à la paille (tiges de sainfoin grossières), elle « sert plutôt à faire ruminer les agneaux, mais ils la valorisent bien », reprend le Théo Buerlé. Sa valeur est de 93 % de MS, 5 % de matière azotée et 0,3 UFL/kg. Les éleveurs espèrent donc que ce programme sera prolongé au-delà des trois ans initiaux pour « développer ce projet fructueux ».

(1) Groupe de luxe détenteur notamment des marques Gucci et Yves Saint Laurent.