Le Covid et l’inflation auraient-ils porté un coup fatal à la consommation de produits bio ? Les vendeurs spécialisés sont convaincus que non, mais l’année 2021 a vu leurs ventes se tasser de manière inédite, et la tendance se prolonge sur le début de l’année 2022.

Des chiffres d’affaires en repli

Biocoop a enregistré une « légère baisse de chiffre d’affaires », à 1,6 milliard d’euros malgré 81 ouvertures de magasins, observe Pierrick de Ronne, le patron de l’enseigne. Cette dernière compte 767 magasins au total pour 7 500 salariés.

 

Pour Naturalia, le spécialiste bio du groupe Casino (Géant, Monoprix, Franprix, Vival…) a enregistré 385 millions d’euros de ventes en 2021 contre 395 millions en 2020, et ce malgré 38 nouveaux magasins.

 

Du côté de Bio C’Bon, racheté en novembre 2020 par Carrefour, Benoît Soury reconnaît un « contexte global de marché pas facile » dans lequel il a fallu intégrer le réseau de magasins. Les « chiffres au début de 2022 sont plutôt satisfaisants », assure à l’AFP le directeur du marché bio chez Carrefour, mais sans les communiquer.

 

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5,1 % des parts de marché

Le groupement d’indépendants des Comptoirs de la Bio a bien vu ses ventes croître, comme indiqué par son partenaire, le groupement Intermarché. Avec un chiffre d’affaires de 311 millions d’euros en 2021, il enregistre une hausse de 5,4 % par rapport à 2020.

 

L’enseigne attribue cette progression notamment aux 39 ouvertures et ralliements de magasins à son réseau, « car nous suivons peu ou prou l’évolution globale du marché », dit-elle dans un message à l’AFP.

 

L’ensemble est loin des croissances à deux chiffres que connaissaient les ventes avant la crise du Covid-19. Selon le cabinet d’études IRI, avec 5,1 % de parts de marché en 2021, « le bio stagne ».

 

Parmi les raisons invoquées par cette source, figure le tassement des lancements de gammes bio, qui pourrait encore s’accroître avec le déréférencement de certains produits bio chez les distributeurs alimentaires généralistes, mais aussi un « frein prix indéniable ».

Concurrence avec d’autres allégations

« Le tout bio est loin d’être à la portée de toutes les bourses », avait analysé à la fin de janvier l’association de consommateurs Familles rurales. « Le prix du bio n’a jamais empêché le marché de croître », répond à l’AFP Allon Zeitoun, le directeur général de Naturalia.

 

« Le sujet, c’est plutôt que le consommateur est extrêmement engagé, mais qu’il n’est plus tellement au clair sur la valeur du bio » au milieu d’une multiplication de labels, haute valeur environnementale, produit local…

 

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Le président de Biocoop Pierrick De Ronne avait avant lui fait le constat de « la perte de confiance, ou en tout cas du questionnement » quant au label bio, qui garantit l’absence d’engrais et de pesticides de synthèse dans la production des produits.

 

Face à lui ont émergé « différentes allégations qui viennent faire croire que c’est du bio moins cher », regrettait encore le patron de Biocoop. « Dans un contexte de préoccupations autour du pouvoir d’achat, ça fait mouche. »

Local et militantisme

Allon Zeitoun, également président de Synadis Bio, syndicat des distributeurs spécialisés, estime en outre que le gouvernement actuel n’est pas très favorable au bio. « Alors qu’il a toute sa pertinence en termes de réduction des gaz à effet de serre ou d’impact sur le sol et le climat », estime-t-il. Il n’espère pas « moins de TVA, ce qui ne changerait pas la différence de prix, mais une position claire en faveur du bio ».

 

Au début de mars, l’Agence bio avait annoncé une campagne de promotion de la consommation en mai, pour faire face au tassement de la demande, alors que la France est le premier pays européen en production bio, avec 13 % des fermes engagées dans ce mode de production.

 

Les distributeurs prévoient en outre d’insister sur le caractère « local » des produits vendus, tendance de consommation en vogue depuis l’épidémie de Covid-19, et sur leurs engagements militants justifiant les écarts de prix avec l’offre conventionnelle.

 

« Essoufflement ou pause contextuelle, ce qui est certain, c’est que les consommateurs arbitrent dans un contexte et une actualité dense », analyse-t-on du côté des Comptoirs de la Bio.

 

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