Dans une nouvelle campagne de mesure nationale menée de 2023 à 2025, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a étudié la présence de PFAS, les « polluants éternels », dans l’eau destinée à la consommation. Les résultats ont été dévoilés le 3 décembre 2025. La famille des PFAS regroupe de nombreuses molécules d’origine très diverses (mousses anti-incendies, revêtements…). Focus sur le TFA (acide trifluoroacétique), qui peut être un produit de dégradation de produits phytosanitaires.

Le TFA très fréquemment retrouvé

Sur les 35 PFAS recherchés, 20 ont été détectés dans des échantillons d’eau brute et 19 dans les échantillons d’eau distribuée au robinet. Le TFA a été détecté dans 92 % des prélèvements : c’est la molécule qui a été le plus fréquemment mesurée.

L’Anses confirme ainsi la « très forte présence du TFA » dans les eaux, mais « sans jamais dépasser la valeur sanitaire indicative de 60 µg/l (microgramme par litre) », précise Sophie Lardy-Fontan, directrice du laboratoire d’hydrologie de l’Anses.

Des travaux pour établir les seuils sanitaires du TFA sont en cours par l’Efsa, l’Agence de sécurité sanitaire européenne. Ils devraient aboutir en 2026. L’Anses préconise d’ajouter le TFA dans la liste des PFAS surveillés de manière pérenne dans les eaux.

Sept substances actives phytos potentielles

« Il existe des substances actives phytosanitaires susceptibles de produire du TFA », confirme Charlotte Grastilleur, directrice générale déléguée de l’Anses. Selon des travaux danois qu’elle relaye, ces molécules seraient au nombre de sept, dont le flufénacet, récemment interdit.

Pour ces substances, « il faut une réévaluation rapide pour vérifier les risques de pollutions des eaux au regard des limites de qualité » de leurs métabolites, appuie l’experte. Plusieurs États membres ont plaidé pour ces révisions rapides à l’échelle européenne.

« On nous a demandé de retirer du marché tout ce qui, de près ou de loin, serait susceptible de produire [du TFA] ». Mais à l’heure actuelle, « les preuves ne sont pas suffisantes », affirme-t-elle. Sur la base de son étude, l’Anses ne lance pas d’alerte sanitaire.

TFA : des origines variées

Les origines de la pollution des eaux par le TFA sont variées. L’Anses explique que le TFA est « largement utilisé pour des synthèses organiques en tant que solvant, catalyseur ou réactif. Sa présence dans l’environnement résulte des rejets d’industries produisant et/ou utilisant cette molécule, mais également de la transformation de précurseurs », comme certains produits phytosanitaires.

Et l’Anses indique que « la contribution respective des différentes sources de TFA n’est pas clairement établie et n’est probablement pas identique en tous lieux. » Charlotte Grastilleur, estime que dans les « zones agricoles a priori, les phytos pourraient prédominer ». Mais elle reste prudente, en appuyant sur le fait que « les observations ne nous permettent pas de conclure de manière unilatérale sur l’implication des phytos ».

« Parmi les sources qui contribuent à la distribution de TFA dans l’environnement, il y a les retombées atmosphériques, indique Xavier Dauchy, adjoint au chef de l’unité chimie des eaux au laboratoire d’hydrologie de Nancy. Elles vont impacter directement les eaux de surface. » C’est une hypothèse qui peut expliquer la présence généralisée du TFA dans les eaux de surface.