« Je suis venu en tant que président de la République pour envoyer le message à nos paysans et aux Français qu’on a besoin de nos paysans pour nos paysages, pour nos territoires et pour manger. » En visite au Sommet de l’élevage dans le Puy-de-Dôme ce 4 octobre 2019, Emmanuel Macron a tenté de rassurer les agriculteurs sur les attentes fortes portées par la société. « Les gens veulent une alimentation de qualité et c’est celle qu’on fait maintenant. On a les normes sanitaires et environnementales les plus exigeantes », a-t-il expliqué à Yannick Fialip, président de la chambre d’agriculture de la Haute-Loire.

« On est mauvais parce qu’on continue à aller acheter à l’étranger »

Le chef de l’État a été interrogé sur le poids des charges qui pèsent sur les exploitations. « On est en train de les alléger, a-t-il répondu. Ce sont les cahiers des charges et les contraintes de production qui sont exigeantes. Il faut valoriser ce qu’on produit et déjà à réussir à le vendre. On ne le fait pas suffisamment lorsqu’on parle de viande bovine. On est mauvais parce qu’on continue à aller acheter à l’étranger. »

 

Un constat auquel contribue Emmanuel Macron par la signature de contrats de libre-échange, selon Yannick Fialip : « On a besoin de protection. Protégez-nous. » […] « Je sais. C’est pour ça que je suis là », a répondu le président de la République avant son entrée dans le hall des bovins à viande, plus d’une heure après son arrivée et à peine 30 mètres traversés.

 

Emmanuel Macron à son arrivée au Sommet de l’élevage. © J. Chabanne
Emmanuel Macron à son arrivée au Sommet de l’élevage. © J. Chabanne

Un président à l’écoute et attendu

Très sollicité, Emmanuel Macron a continué sa déambulation à petit pas. Davantage à l’aise que son service d’ordre sous tension, en raison sans doute du chahut qui a accompagné la sortie du député Jean-Baptiste Moreau la veille, il est allé à la rencontre de producteurs et a pris le temps de leur répondre.

 

Benjamin Dupin, éleveur de bovins dans le Lot-et-Garonne, en a fait partie. « Depuis qu’on s’est installé en octobre 2016, on a pris que 4 000 euros de salaires. Les prix sont les mêmes depuis 20 ans, a souligné l’éleveur de 30 ans. On ne vit plus de notre métier. On est prêt à faire des efforts mais il nous faut des prix. »

 

Même s’il s’avoue « résigné », Benjamin reste « optimiste » sur les suites de la visite du président de la République. « Il a dit qu’il nous avait entendus et qu’il était conscient de nos problèmes. Est-ce que ça bougera ? Ça, c’est autre chose. » Une position partagée par Joël Sillac, éleveur de bazadaises dans les Landes et le Gers.

 

« Je lui ai rappelé qu’avec le travail des éleveurs, on arrive à développer notre race et à avoir de la qualité et des prix, a lancé le président de l’organisme de sélection bazadais au chef de l’État. On vend à 5,50 € le kilo. Le modèle de nos élevages correspond à ce que la société nous demande mais nous ne sommes pas suffisamment aidés. Le nouveau traçage des zones défavorisées dans les Pyrénées-Atlantiques, les Landes et le Gers a causé des pertes de revenus qui mettent ces élevages en difficulté. »

« J’avais besoin de voir les éleveurs »

Avançant à un rythme de sénateur, Emmanuel Macron a ensuite déjeuné sur le stand d’InterbevLa France Agricole a pu l’interroger. « Je suis venu car j’avais besoin de voir les éleveurs, comme eux avaient besoin de me voir. Je souhaite leur apporter un message de soutien dans une situation difficile, en particulier pour l’élevage bovin. Le dénigrement et l’agressivité que subissent les éleveurs sont inacceptables. Nous pouvons être fiers de la qualité des productions françaises et nous les défendrons. »

 

Le dénigrement et l’agressivité que subissent les éleveurs sont inacceptable

Emmanuel Macron

Sur le plan d’urgence sécheresse, Emmanuel Macron a annoncé que « nous allons appliquer des taux d’indemnisation plus important et aller plus vite ». « Les analyses pour les projets de rétention d’eau se feront bassin par bassin, il faut rapidement arriver à cent projets », a-t-il détaillé. Patrick Bénézit, secrétaire général adjoint de la FNSEA et David Chauve, secrétaire général adjoint de la FRSEA, ont accueilli avec satisfactions ces annonces.

 

« L’abaissement de 13 % à 11 % du coefficient de sécheresse (perte de productions fourragères sur le produit brut standardisé) retenu pour être éligible au dispositif calamités va permettre d’indemniser un plus grand nombre d’éleveurs, ont-ils estimé. Ce même taux aurait permis d’instruire 300 dossiers de plus l’an passé dans le seul département du Puy-de-Dôme. Cette décision prouve une prise de conscience des difficultés des éleveurs confrontés à deux sécheresses consécutives. L’annonce d’aller plus vite dans le traitement des dossiers est également appréciable. »

« Défendre les éleveurs par rapport à certains industriels »

Le président de la République s’est également exprimé « sur un plan économique » : « il faut parvenir à des justes prix à la production et défendre les éleveurs par rapport à certains industriels qui ne jouent pas le jeu. En venant ici, je tenais à voir beaucoup de monde et à apporter un message très clair de soutien. »

 

Emmanuel Macron est attendu au tournant. « Le président de la République comprend nos problèmes. Nous attendons de lui et de son gouvernement des décisions efficaces et rapides pour assurer des prix corrects à nos produits, ont jugé les deux syndicalistes. Il y a urgence, nous n’aurons bientôt plus “le temps économique” de sauver nos exploitations ». Le chef de l’État a quitté le Sommet vers 17 h avant un dernier bain de foule et une sortie sous les applaudissements. À lui désormais de transformer l’essai marqué en terre auvergnate.