Dans quel contexte s’inscrit le programme de sélection Pea4Ever ?
Après le succès du tout premier « plan protéines » il y a cinquante ans, les initiatives suivantes ont manqué d’ampleur et de continuité dans leur vision. À la fin de 2020, les interprofessions des grandes cultures et de l’élevage, conjointement au ministère, ont donc lancé « la stratégie nationale protéines végétales », avec une prise de conscience que le problème de la souveraineté protéique et, en particulier, des légumineuses, ne pouvait se résoudre en deux, trois ans.
Cette stratégie a su tirer des leçons des précédentes tentatives, et ne joue pas uniquement sur le levier des subventions à la production, qui n’ont jamais d’effets durables. Terres Univia et ses familles (producteurs, semenciers en particulier) ont alors démontré aux pouvoirs publics qu’il manquait d’investissements dans l’amélioration variétale, qui est pourtant la base de la performance des cultures. Et ce, d’autant qu’il n’y a pas de cotisations semences comme en céréales et assez peu de semences certifiées.

Pourquoi orienter les recherches sur le pois, plutôt qu’une autre légumineuse ?
Dans les années 1990, le pois a connu son pic de rendements et des surfaces qui ont atteint quasiment 900 000 ha. On sait donc que cette espèce peut occuper une place significative dans le paysage agricole français. Ce n’est pas, non plus, raviver une espèce puisque les programmes de sélection sont restés actifs, avec de très belles bases de travail.
Toutefois, le pois n’est pas à un niveau satisfaisant de performance technique et économique pour les producteurs. Et ce d’autant plus avec la succession de problèmes des dernières années : déficit hydrique, automnes et hivers doux suivis de gels soudains qui créent des portes d’entrée pour les maladies…
Quels moyens ont été mis en œuvre ?
Face à de constat, trois entreprises semencières françaises — Limagrain, Florimond Desprez et RAGT — ont créé le GIE PeaBoost. L’idée : accroître significativement les investissements de recherche etdéveloppement, en mutualisant les programmes de sélection du pois protéagineux, au travers d’un ambitieux programme de recherche intitulé Pea4Ever. Un dispositif qui devrait mobiliser de l’ordre de 15 millions d’euros (M€) par les semenciers, un peu moins de 10 M€ de fonds par la filière, au travers de Sofiproteol, et environ 25 M€ de subventions publiques.
Les signatures du financement de ce programme de cinq ans (de 2025 à 2030) sont une affaire de semaines. En mutualisant des moyens inédits (outils de prédiction génomique, phénomique, speed breeding…), et qui ne se justifiait pas jusqu’alors sur pois, nous devrions pouvoir proposer de nouvelles variétés aux agriculteurs d’ici à sept ou huit ans, là il aurait fallu attendre dix ou quinze ans !
Quelles vont être les principales thématiques de travail ?
Notre objectif, c’est d’avoir des variétés performantes et régulières. Pour cela, l’implémentation de toutes les techniques à haut débit va permettre de faire de la sélection plus rapidement sur tous les critères, le premier d’entre eux étant le rendement.
Il faut aussi arriver à combiner la multirésistance sur des critères comme la bactériose, l’ascochytose, le colletotrichum, l’aphanomyces, les viroses transmises par les pucerons… Mais d’autres sujets seront travaillés, comme la tolérance aux stress climatiques ou l’identification de génétiques moins sensibles aux chocs mécaniques à la récolte, en lien avec les multiplicateurs de semences. La thématique de la qualité, focalisée sur les débouchés pour les ingrédients en alimentation humaine, est un autre axe de travail avec l’idée que les pois d’hiver soient autant utilisés par l’industrie que les pois de printemps.