La ruralité revient dans les radars du débat public. « Les Gilets jaunes, la crise sanitaire puis agricole, les dernières élections… tout cela montre que la ruralité est au cœur de beaucoup d’enjeux actuels, l’environnement, la souveraineté, la transition énergétique, la cohésion nationale. Il est donc temps de définir une politique d’aménagement des territoires qui assure la convergence entre le local et le national », estime le sénateur du Cantal Bernard Delcros (UC) en introduction d’un débat au Conseil économique, social et environnemental sur le dynamisme des territoires ruraux le 25 septembre 2024.

Conflictualité

Encore faut-il ne pas fantasmer la ruralité et bien la définir ? Roger Crueyze, directeur d’une société d’économie mixte en Lozère, vante les valeurs de travail et de respect qu’on trouverait encore dans les milieux ruraux. Mais le chercheur de l’Inrae Gilles Laferté, spécialiste de la ruralité, sonne l’alarme : « Plus aucun sociologue ne parle de culture rurale. La façon dont on a parlé de la ruralité dans les années précédentes, c’était pour lui faire endosser une sorte de culture traditionnelle. Ce n’est pas du tout la façon dont beaucoup de personnes se représentent la ruralité. »

« Aujourd’hui, la ruralité n’est pas une France singulière et autonome. Elle est traversée par les enjeux de la société plus forts que la seule question de l’éloignement des villes. Comme le reste de la France, elle se structure en territoires bourgeois, populaires ou autres. Donc, les espaces ruraux sont face à une conflictualité de plus en plus forte », prévoit Gilles Laferté.

Coopération

Et pourtant, s’il y a une particularité qui émerge des expériences présentées devant le Conseil économique, social et environnemental, c’est celle de la coopération, assez forte en milieu rural. Dans la Dombes (Ain), c’était la motivation initiale de la création d’un jeu par les habitants eux-mêmes.

Le jeu est un quiz qui permet aux touristes de découvrir la région. Son élaboration s’est faite avec les habitants qui ont écrit et sélectionné les cinq cents questions. « Dès le départ, nous voulions favoriser les liens entre les habitants », se souvient Monique Michel, bénévole au conseil de développement de la Dombes.

En Aveyron, la commune d’Arvieu a aussi fait participer les villageois à la reconversion d’un ancien couvent en un tiers-lieu pour faciliter le travail des nouveaux arrivants dans ce bourg de 800 habitants. Même le travail des architectes s’est construit en dialoguant avec les habitants.

Désormais, c’est tout un ensemble qui permet d’accueillir des travailleurs éloignés des villes. Dans le prolongement, la commune vient de racheter un château pour proposer aux familles des logements passerelles.

Appui supplémentaire

« Au final, nous ne devons pas cultiver un discours sur l’abandon des territoires ruraux », scande Stéphane Aurousseau, agriculteur et président du Groupe monde rural qui réunit différents acteurs de la ruralité. Certes, mais Roger Crueyze, de la société d’économie mixte de la Lozère, et Dany Delmas, un chef d’entreprise du Tarn, se rejoignent pour demander un accompagnement spécifique des activités économiques dans les territoires ruraux : « Il faut un appui supplémentaire pour être le laboratoire des politiques du logement, de la coopération, etc. »