La baisse des prix agricoles en 2024, en particulier dans les productions végétales, a fait reculer la production agricole de 7,5 % en valeur, selon les comptes prévisionnels de l’Insee publiés hier, le 12 décembre 2024. Et l’excédent brut d’exploitation moyen (EBE) par exploitation recule de 26 % à 66 450 €.

« Une fragilisation du secteur agricole », pour les chambres d’agriculture

Pour Chambres d’agriculture France, les comptes prévisionnels de l’agriculture « attestent d’une fragilisation du secteur agricole, à l’heure où les défis sont nombreux qui exigent des capacités de financements supplémentaires », soulignent-elles dans un communiqué.

« Le solde disponible par exploitation, qui découle de l’EBE duquel ont été déduites les annuités d’emprunts et les cotisations sociales de l’agriculteur, fléchit de 44,7 % pour atteindre 29 340 €. Ces résultats surviennent aussi à un moment où les agriculteurs ne cessent d’exprimer leurs préoccupations quant à la pérennité de leur outil de production et de leurs exploitations agricoles et des craintes générées par la signature récente de l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur et de ses conséquences attendues. »

Sébastien Windsor, le président des chambres d’agriculture, complète : « Avec un solde disponible de moins de 30 000 €, on ne peut pas demander aux agriculteurs d’investir dans les transitions. Il y a urgence à redonner de la compétitivité à nos exploitations. Cela passe par des mesures de simplification, des aides fiscales… Il y a urgence à lever les freins et donner des moyens massifs pour accompagner les agriculteurs. »

Revenus « en berne », « catastrophiques »

« Révélant des revenus en berne » pour l’année 2024, les comptes nationaux de l’agriculture démontrent « un peu plus la situation d’urgence du monde agricole » pour les syndicats majoritaires FNSEA et JA. « Pour la deuxième année consécutive, le résultat brut de la branche agricole par actif non salarié se dégrade fortement : il chute de 10,2 % après une forte baisse déjà enregistrée l’année dernière (–13,4 %) », soulignent-ils.

« Avec de telles évolutions, combinées à une baisse des prix dans certains secteurs et une hausse des charges généralisée, la situation de certains agriculteurs, notamment les plus touchés par les intempéries ou les maladies vectorielles (FCO, MHE…), est alarmante et devient insoutenable. » Dans ce contexte, JA et la FNSEA se félicitent de la mise en place de prêts bonifiés, réclamés de longue date par le syndicat : « C’est une première étape pour conforter les comptes économiques exsangues. »

La Confédération paysanne voit dans les comptes prévisionnels de l’agriculture, « des revenus catastrophiques pour les agriculteurs et agricultrices, qui succèdent à une année déjà médiocre en 2023. Ce constat accablant est l’illustration d’une tendance lourde et inquiétante ».

Pour le syndicat, le risque est de voir s’éteindre encore plus de fermes : « Entre 2005 et 2020, [des] exploitations agricoles ont disparu, emportant avec elles des milliers d’emplois, de savoir-faire et de territoires vivants. En France, la chute du nombre de paysans et de paysannes se poursuit dans une indifférence générale. »

Le syndicat pointe aussi des « inégalités insupportables » entre productions, ainsi qu’entre agriculture conventionnelle et biologique. « Il est urgent de changer radicalement de cap », souligne dans son communiqué la Confédération paysanne, qui exige notamment l’arrêt des accords de libre-échange, la mise en place de prix rémunérateurs et de protection, et la réorientation de la Pac.