18 600, c’est le nombre de robots agricoles présents en France, selon le dernier Observatoire des usages du numérique en agriculture publié en mai 2023 (lire l’encadré ci-dessous). En agissant de manière autonome, les robots apportent des réponses pour libérer l’agriculteur de certaines tâches, mais ils posent aussi des questions. En cas de défaut sur la machine ou en cas d’accident, qui est responsable ?
Si les accidents sont rares, ils ne sont pas inexistants. Le 13 juillet 2017, la Cour de cassation avait notamment eu l’occasion de se prononcer sur une affaire où les dysfonctionnements et la dangerosité d’une salle de traite avaient été mis en cause. Un éleveur avait été blessé, trois vaches ont été retrouvées mortes et cinq autres ont dû être abattues à leur suite de leurs blessures pendant la traite.
Le fournisseur est responsable du robot défectueux
« Si le robot présente une dangerosité inattendue, il s’agit d’un défaut de sécurité. La responsabilité spéciale du fait des produits défectueux pourra s’appliquer », explique Aude Denizot, professeur agrégé de droit privé à l’Université du Mans et membre de la Chaire Droit & transitions sociétales intervenant lors du dernier congrès de l’Association française de droit rural en octobre 2023.
C’est alors le fabricant du robot qui est responsable. Si plusieurs sont intervenus dans la production du robot, c’est le fabricant du produit fini qui est responsable solidairement avec tous ceux qui sont intervenus avec les parties composantes.

En cas de panne ou de dysfonctionnement sans dangerosité inattendue, l’agriculteur qui a acheté ou loué son robot va pouvoir en agir en garantie des vices cachés éventuellement couplée avec une action en responsabilité délictuelle contre le fournisseur. Cette garantie des vices cachés n’est pas applicable si le robot intervient dans le cadre d’un contrat de prestation de services signé entre l’agriculteur et un prestataire. Ici, l’avocat de l’agriculteur conseillera d’agir en responsabilité contractuelle.
L’agriculteur est responsable de son robot autonome
Si une victime subit des dommages en raison du robot, c’est son utilisateur, l’agriculteur, qui pourra voir sa responsabilité engagée. « Dans le cas où c’est l’agriculteur qui pilote lui-même son robot, qui le dirige, il en est le gardien et c’est lui qui est responsable, détaille la professeure de droit. La victime doit prouver le fait actif du robot. S’il y a eu un contact avec le siège du dommage et s’il y a eu mouvement, il y a une présomption de fait actif. S’il n’y a pas eu de contact et de mouvement, la victime doit prouver le fait actif de la chose, c’est-à-dire qu’elle va devoir prouver que le robot était dans une position anormale ou qu’il avait un comportement anormal. »
Des règles spéciales s’appliquent aux robots terrestres. Circulant sur le sol, ils sont considérés par la loi comme des véhicules terrestres à moteur et peuvent donc être sujets d’accidents de la circulation comme ce serait le cas entre un tracteur et une voiture. « Le vétérinaire qui se fait bousculer par le robot aspirateur de lisier, c’est un accident de la circulation », illustre Aude Denizot. Autre exemple, la situation où un parapentiste s’écraserait sur un robot travaillant en plein champ serait aussi qualifiée d’accident de la circulation.
Si l’agriculteur est victime de son propre robot
Si la victime du robot est l’agriculteur lui-même, ses capacités pour agir sont réduites. S’il ne peut invoquer un défaut de sécurité ou un vice caché de la machine, il ne pourra pas obtenir de réparation de la part du fournisseur. « Si le robot fonctionne très bien, c’est l’agriculteur qui est responsable et on ne peut engager la responsabilité de personne. Il doit alors s’assurer spécifiquement pour les dommages corporels », conseille Aude Denizot.