Le 13 septembre 2018, deux cadavres de sangliers sont déclarés positifs à la peste porcine africaine (PPA) dans la Gaume, une région située dans le sud de la province du Luxembourg. La Belgique était jusque-là indemne du virus.
À quelques kilomètres de là, Pauline Vandenbussche élève 2 500 porcs en bâtiments fermés, avec sa mère qu’elle a rejointe depuis 2016 sur une exploitation naisseur engraisseur. La confirmation de plusieurs de cas de PPA dans la faune sauvage au cours des jours qui suivent fait craindre le pire aux éleveurs de la région.
Intervenir sans tarder
« Tout s’est enchaîné relativement vite », se souvient Pauline. Lorsque la nouvelle tombe, elle est alors en pleine semaine de sevrage de ses porcelets. « Sur les 800, je devais en garder 350 à l’engraissement, et le reste devait partir pour la Flandre ». Compte tenu de l’interdiction de déplacement des porcins en dehors de la zone infectée ordonnée par l’Afsca, l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire, elle se retrouve « avec 450 porcelets sur les bras », tous les bâtiments de l’exploitation étant déjà pleins.
L’exploitante les installe alors « dans une fumière avec des bottes de paille autour » et décide de solliciter les dirigeants de la région. « J’ai envoyé une photo des porcelets en disant : je fais quoi ? L’après-midi même, un coup de téléphone m’a informé qu’ils seraient abattus le lendemain, à la maison ».

« C’est à partir de ce moment-là que les autorités se sont rendu compte qu’il fallait réagir vite face au risque sanitaire ». Fin septembre, l’ensemble du cheptel de l’exploitation est abattu par prévention, ainsi que tous les porcs de la Gaume. Près de 6 000 animaux — issus de trois grosses exploitations et de particuliers — sont partis à l’équarrissage, et non dans la chaîne alimentaire, même s’ils n’étaient pas contagieux, regrette l’éleveuse.
Lutte et biosécurité
Dès lors, les autorités sanitaires déploient une stratégie renforcée pour éliminer les sangliers, afin d’éradiquer la PPA du territoire. Comptages, captures dans des boxes, abattages et ramassages des nombreux cadavres retrouvés morts dans les forêts, ont permis de conclure à l’absence de circulation du virus chez les sangliers en septembre 2019. Le pays retrouve son statut « indemne de la PPA » en décembre 2020, ce qui permet d’abroger les mesures de vide sanitaire, initialement prévues jusqu’en mars 2021.
Le gouvernement autorise le repeuplement des élevages des zones touchées par la PPA le 25 janvier 2021, sous réserve du respect des normes de biosécurité. Ces mesures imposent des bâtiments totalement fermés pour l’élevage de porcins, sauf pour les élevages bio en extérieur qui doivent s’équiper d’un système de triple clôture (1). Côté transports des animaux et des aliments, la règlementation prescrit l’obligation de désinfecter les roues et tuyaux des camions après passage sur un élevage porcin, en plus des procédés habituels de nettoyage.
Un projet d’élevage qui a évolué
Après une tentative de reprise de la production porcine en 2021, lors de la levée du vide sanitaire, Pauline a finalement fait évoluer l’exploitation avec son conjoint, renonçant à l’activité porcine, peu rentable dans le contexte du moment. Ensemble, ils reprennent peu à peu l’exploitation bovine de sa belle-famille et maintiennent leur production céréalière. « Un choix tant financier que logistique par rapport à la charge de travail, mais pour autant pas facile », explique l’exploitante qui portait une affinité particulière à l’élevage porcin. « La peste porcine africaine nous a un peu permis de dire on arrête ».
Aujourd’hui, entre les 500 vaches limousines, plus de 400 hectares de SAU et trois enfants à ses côtés, l’ancienne éleveuse de porcs semble avoir trouvé un nouvel équilibre.
(1) Première clôture exigeant 1,20 m de hauteur minimale, puis une clôture à trois fils, et la clôture du parc.