Ses vidéos les plus confidentielles sur Tik Tok ont été visionnées des milliers de fois, les plus virales dépassent allégrement le million de vues. Matin, midi, soir et parfois plus, sous le nom de Conor l’agricultor, Christophe Durand s’adresse à ses plus de 100 000 followers. Depuis deux ans, avec la complicité de sa femme Angélique, ce polyculteur-éleveur de l’Ain parle d’agriculture… mais pas que. Certaines vidéos sont pédagogiques : combien vaut un quintal, pourquoi écorner les vaches, qu’est-ce que la FCO… ? D’autres montrent une tranche de vie – repas, loisirs… Avec toujours de l’humour et une bonne humeur communicative.

« Les gens n’imaginent pas la vraie vie des agriculteurs, qu’ils voient souvent comme des gens bourrus qui se plaignent, explique-t-il. Je voulais montrer une autre facette, moi qui suis ravi de ma vie ! » Derrière la caméra du smartphone, Angélique le prend sur le vif et lui pose des questions rarement préparées à l’avance. « Venue de la ville, j’étais moi-même bourrée de préjugés sur les agriculteurs avant de rencontrer Christophe il y a douze ans, sourit-elle. Je joue le rôle de la citadine qui pose des questions bêtes pour vulgariser le sujet. » Une aide précieuse : « Avant, quand je parlais de mon métier, je perdais les gens : je pensais que cela ne les intéressait pas », confie Conor.

Détricoter les idées fausses

Le succès des vidéos l’a détrompé. « Je me demandais si j’aurais des choses à raconter quatre fois par jour, mais le quotidien fournit assez de sujets, constate-t-il. Tout est spontané, nous ne faisons qu’une prise : les gens aiment le naturel, même si on bégaie… Et ils sont prêts à tout entendre si on leur explique en restant authentique. »

Une bonne partie des followers ne sont pas du milieu agricole, et il n’est pas rare que certains demandent l’éclairage de Conor sur un sujet faisant polémique. Le regard de leurs proches aussi a changé… dans le bon sens. « Grâce à ces vidéos et aux commentaires positifs des copains, le métier d’agriculteur a pris de la valeur aux yeux de nos enfants, témoigne Angélique. Et nos amis comprennent mieux nos contraintes, quand on loupe une invitation à cause d’une urgence. »

Le couple est transparent sur les recettes générées par les vidéos. « Il y a une monétisation à partir de 10 000 followers : nous sommes montés certains mois à 3 000 € avant que Tik Tok baisse ses tarifs », révèle Angélique. La chaîne Youtube créée début 2025, qui a aussi rencontré son public, génère aussi un peu de revenus. « Et on nous propose de plus en plus de collaborations, souvent pour tester gratuitement des produits, complète Christophe. Nous n’acceptons que ceux en rapport avec mon métier et restons toujours authentiques. »

Quoi qu’il arrive, l’agriculture sera toujours sa priorité, affirme-t-il. « D’ailleurs, si j’arrêtais, je n’aurais plus grand-chose à raconter ! »