Avec 750 brebis sur 200 hectares, Étienne de Saint-Laumer dispose de ressources suffisantes pour nourrir son troupeau. Les animaux restent deux mois et demi en bergerie, le reste du temps à l’extérieur, dans les environs de Thivars (Eure-et-Loir). On les aperçoit régulièrement dans les champs, avec la cathédrale de Chartres en toile de fond.
Autour de la ferme de Tachainville, 90 ha sont clôturés, offrant aux brebis l’accès à des prairies, des couverts végétaux ou des repousses. En hiver, elles disposent d’avoine-vesce, et orge ; en juin, du trèfle semé sous colza ; l’été, du tournesol, de l’avoine ou encore de la vesce.
Une adaptation continue
En circuit court, l’éleveur s’organise avec quatre périodes d’agnelage, une multitude de lots et un pâturage tournant d’une semaine environ. « Ici, tout est flex ! On sème, et on verra après si c’est pour les moutons ou la moissonneuse-batteuse », lance Étienne de Saint-Laumer. Il s’adapte aux aléas climatiques : chaque parcelle est découpée en unités de 10 ha, hébergeant entre 200 et 300 brebis. Il conserve également un stock de semences pour pouvoir réagir rapidement et adapter les cultures.
À 40 ans, Étienne est bien conscient des impacts du changement climatique et anticipe son évolution. Il vient de planter 400 arbres, « pour faire de l’ombre » à ses brebis. « 60 à 70 % des luttes échouent quand il fait trop chaud, et les périodes chaudes s’allongent. J’ai donc replanté des arbres là où Napoléon en avait planté en 1820 », explique l’éleveur, féru d’histoire. En discutant de son projet avec Benoît Caumont, conseiller en agroforesterie, il choisit des variétés qui pourront être taillées en têtard, fournissant ainsi de l’ombre mais aussi du fourrage en fin d’été. Il opte pour le frêne à fleurs, l’acacia, le chêne vert et le mûrier blanc.
Un financement de Novo Nordisk et Leclerc
Les arbres sont implantés à 3 m des clôtures pour le passage d’une tondeuse, espacés de 4 m, et de 12 m en porte de champ pour laisser passer la moissonneuse. Sans labour sur la ferme, le terrain est préparé avec un sous-soleur composé d’une dent de 40 cm de profondeur. La plantation des 400 arbres dure deux jours à quatre personnes. « Le plus long, ce sont les protections, se souvient Étienne. Nous avons ajouté un piquet de clôture en acacia et un filet premium contre les chevreuils. » Les abords de la bergerie sont également arborés afin de limiter le vent. Les arbres qui poussent tout seuls le long de la route sont également préservés pour confectionner une haie naturelle.
À raison de 1 € le plant et 8 € de protection, Étienne de Saint-Laumer aurait dû débourser 3 600 €. Mais cette opération ne lui a coûté que 100 arbres, soit 900 €. Pour le reste, il est allé frapper à la porte de deux entreprises locales : Novo Nordisk, un fabricant d’insuline, et Leclerc, son client pour les brebis. « Osez aller voir les entreprises ! Elles recherchent ce genre de projet pour leur politique RSE, responsabilité sociale et environnementale », conseille Étienne. Pour que l’action de mécénat soit reconnue, les entreprises sont passées par le fonds After (agroforesterie et territoire), porté par l’Association française d’agroforesterie. 70 % de la somme investie est destinée à la plantation d’arbres et 30 % à des actions de sensibilisation.