Agriculteurs, malteurs, brasseurs… L’orge brassicole doit répondre à de multiples attentes. « Le travail des sélectionneurs est de cocher les cases de tous ces paramètres. Sur les quinze dernières années, ils ont permis d’importants progrès », souligne Marc Schmitt, directeur de l’Institut français des boissons, de la brasserie et de la malterie (IFBM), le 18 avril à Reims lors d’un colloque sur les orges brassicoles.

La filière brassicole utilise des orges à deux rangs de printemps (2RP), six rangs d’hiver (6RH) et deux rangs d’hiver (2RH), ces dernières étant toutefois peu cultivées en France. « Ce sont des espèces différentes, qui ont une génétique différente, explique Marc Schmitt. Les sélectionneurs sont obligés d’avoir des programmes de sélection dédiés pour chacune d’elles, ce qui nécessite des moyens et investissements importants. »

Progrès agronomique

En moyenne, le rendement traité des variétés d’orge brassicole inscrites entre 2007 et 2020 a progressé de 0,34 q/an en 6RH, de 0,65 q/an en 2RH et de 0,69 q/an en 2RP. Sur la période, les teneurs en protéines ont légèrement augmenté en 6RH (+0,03 % par an), de même qu’en 2RP (+0,03 % par an) et ont légèrement diminué en 2RH (–0,03 % par an), du fait de l’augmentation du rendement.

Les variétés d’orges brassicoles ont progressé en rendement agronomique, en tolérance aux maladies (JNO notamment), ou encore en qualité de malt. « On arrive à la même qualité en consommant moins d’eau et en raccourcissant les durées de germination », précise Marc Schmitt.

L’orge 6RH a toutefois perdu des propriétés technologiques (extrait, viscosité du moût…) avec l’arrivée de la tolérance à la JNO. « Les sélectionneurs sont en train de rattraper ce retard », affirme Marc Schmitt.

Vers un panorama de variétés plus segmenté en 2RP

Par ailleurs, « la filière transforme les variétés pures, au moins au niveau de la première transformation, ajoute-t-il. Il faut donc restreindre le nombre de variétés, la place dans les silos des organismes stockeurs étant limitée. »

En 6RH, quelques variétés ont marqué le panorama : Etincel, inscrite en 2012, a remplacé la référence Esterel, puis a laissé place à KWS Faro, en 2018, qui a apporté des progrès agronomiques et technologiques. « Aujourd’hui, tous les dépôts de variétés 6RH sont tolérants à la JNO », indique Marc Schmitt.

En 2RP, Sébastien (2003) a remplacé la référence Scarlett, avant que RGT Planet ne s’impose en 2014. « On sent le déclin de RGT Planet arriver progressivement, rapporte Marc Schmitt. Toutes les variétés inscrites au CTPS ont été significativement meilleures. » Il note par exemple le progrès en malt apporté avec la variété LG Tosca en 2019, le progrès agronomique de KWS Thalis en 2021 ou encore de Sting en 2023.

Encore beaucoup de défis à l’avenir

Pour lui, le panorama des 2RP sera à l’avenir plus segmenté, avec plusieurs variétés leader. « La génétique fait qu’aujourd’hui de nombreux sélectionneurs ont des variétés très performantes qui vont trouver leurs marchés en fonction des zones cultivées et du marché. » Les 2RH sont quant à elles « intéressantes, même si elles ont un marché toujours limité en France. »

Si les progrès ont été significatifs, les sélectionneurs ont encore de nombreux défis à relever : meilleure tolérance aux bioagresseurs avec la réduction des intrants, besoin de régularité et de compétitivité, éviter les périodes de sécheresse et vagues de chaleur avec le changement climatique, meilleure efficience de la fertilisation azotée. « Il faut décarboner, et qui dit décarbonation dit réduction de la fertilisation azotée, et mécaniquement, érosion de la teneur en protéines », complète Marc Schmitt.