Les propositions ne manqueront pas pour alimenter les débats d’une nouvelle loi Egalim. Promis par la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, ce texte doit modifier de nouveau le cadre des négociations commerciales né des États-généraux de l’alimentation de 2017 et des lois « Egalim » qui ont suivi. Un cadre dont l’ambition était d’améliorer la rémunération des agriculteurs mais qui reste perfectible.
Des propositions pour déblayer le terrain parlementaire
Après les propositions des anciens députés Anne-Laure Babault et Alexis Izard et celles du rapport rédigé par les sénateurs Daniel Gremillet et Anne-Catherine Loisier toutes mises sur la table à l’automne dernier, c’était au tour de plusieurs députés de présenter leurs propositions le 11 février 2025 à l’Assemblée nationale. Leur rapport qui devrait être rendu public la semaine prochaine s’est penché sur l’évaluation de la loi Egalim 2 du 18 octobre 2021. Ce texte visait à renforcer la contractualisation entre les agriculteurs et leurs premiers acheteurs et à sanctuariser la valeur des productions agricoles dans toute la chaîne de transformation et de la distribution.
Face à une composition politique éclatée de l’Assemblée nationale qui oblige à trouver des consensus, les quatre députés rapporteurs, de bords politiques différents, ont tenu à déblayer le terrain du débat parlementaire en faisant des propositions susceptibles de convaincre la majorité des députés.
C’est ainsi que les quatre rapporteurs Julien Dive (Les Républicains), Mathilde Hignet (La France insoumise), Harold Huwart (Liot) et Richard Ramos (Modem) formulent plusieurs propositions pour rééquilibrer le rapport de force entre les exploitants, les industriels et les distributeurs.
L’appel à une loi avant l’été
Alors que les élus appellent à une loi avant l’été, ils recommandent de rendre plus incitatif le regroupement en organisation de producteurs ainsi que leur accompagnement pour qu’elles disposent des moyens nécessaires pour négocier les accords-cadres ou les contrats pour leurs membres. Un contrat type est proposé pour aider les producteurs à formuler leur proposition de contrat.
Si la loi Egalim 2 avait imposé le principe de contractualisation obligatoire dans certaines filières (viandes, laits et œufs), celle-ci peine à être respectée notent les députés.
Les marges de la grande distribution dans le viseur
Ils proposent également un renforcement de la transparence sur les marges de l’industrie agroalimentaire et des distributeurs. Sur la marge pratiquée par la grande distribution, les députés proposent de prolonger l’expérimentation du relèvement du seuil de revente à perte des prix des alimentaires de 10 % (appelé aussi « SRP + 10 ») qui doit s’arrêter le 15 avril prochain. Même si le député Stéphane Travert défendra en mars une proposition de loi pour la prolonger, les rapporteurs anticipent sa suppression en proposant de réprimer les distributeurs qui pratiqueraient un taux de marge commerciale abusivement haut par rapport à leurs taux de marge moyens.
Face à ces mêmes distributeurs, les quatre députés proposent également de sanctuariser le coût de la matière première industrielle à l’instar de la matière première agricole et alimentaire.
Les grossistes écartés
Concernant la sanctuarisation de la matière première agricole, les députés rejettent en revanche de l’étendre aux grossistes. Ils l’expliquent par une structure du marché des grossistes différente de celle des distributeurs. Les négociations menées avec les 6 000 grossistes recherchant avant tout une profondeur de gamme et une qualité de produits, plutôt que des prix, limitent le risque de non-respect de la valeur de la production agricole, selon les rapporteurs.
« La loi Egalim ne peut pas tout régler »
« La loi Egalim ne peut pas tout régler. Je pense qu’à titre personnel, il faut aussi des mécanismes de régulation qui viennent stabiliser les prix volatils », a estimé Mathilde Hignet (LFI), députée de l’Ille-et-Vilaine, lors d’une conférence de presse organisée ce 12 février à l’Assemblée nationale aux côtés de ses collègues rapporteurs (mis à part Richard Ramos qui n’était pas présent).
Une régulation des prix qui n’est pas comprise dans ce rapport mais qui pourrait revenir lors des débats parlementaires. Tout comme la proposition de Julien Dive d’expérimenter un encadrement de la contractualisation entre le producteur et son négociant.