« L’environnement a été sacrifié » scandent des représentants de Greenpeace lors d’une conférence de presse le 11 avril 2024 à Paris. Réagissant au projet de loi d’orientation agricole (LOA) présenté le 3 avril en conseil des ministres, les militants déplorent qu’il n’y ait « plus rien qui touche à l’environnement. Pire, il y a un rétropédalage massif. »
Un projet pour faciliter mégabassine et élevage industriel
Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne agriculture à Greenpeace s’interroge : « Le gouvernement a lancé des concertations pendant des mois. Où est passé tout ce travail ? Les arbitrages se sont faits en dehors des ONG et de la société civile. » Résultat, Greenpeace alerte notamment sur deux articles de la LOA.
En ligne de mire, l’article n° 1. « Il vise à définir les notions de souveraineté alimentaire et de souveraineté agricole, affirmant le caractère d’intérêt général majeur de l’agriculture, explique Sandy Olivar Calvo. Et c’est justement cette notion d’intérêt général majeur que l’on veut supprimer. » Pourquoi ? « Parce qu’elle est très floue sur le plan juridique quant aux conséquences qu’elle pourrait avoir sur le droit de l’environnement et l’arbitrage des juges administratifs en cas de contentieux. »
À travers ce premier article, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau veut ainsi placer l’agriculture au même niveau que l’environnement, poursuit-elle. En conséquence, estime Greenpeace, le juge administratif pourra s’appuyer sur cette notion pour pondérer la validité d’un projet agricole, comme « les mégabassines ou les élevages industriels », et ainsi en faciliter la construction.
Associations et riverains limités dans leurs recours
Autre article ciblé par l’ONG, l’article 15. « Celui-ci vise à donner un caractère d’urgence en cas de saisine du juge sur des contentieux concernant des ouvrages hydrauliques agricoles et des installations d’élevages, précise encore la militante. Il aura un mois pour statuer. » Greenpeace affirme que cela portera atteinte aux droits de recours des associations et des riverains qui auront un temps réduit pour constituer des dossiers.
Suzanne Dalle, également chargée de campagne Agriculture à l’ONG, pointe de son côté l’absence d’étude d’impact. « Sous couvert de simplification, le gouvernement va venir soutenir l’industrialisation de l’agriculture française », soutient-elle. Et d’ajouter : « Il est temps d’apporter des vraies réponses aux agriculteurs français et européens, comme la mesure sur les prix planchers, plutôt que de se servir de la crise climatique comme bouc émissaire de l’agriculture. »
Pour faire valoir ces revendications, Greenpeace va envoyer son cahier d’amendements qui formule ses demandes politiques « par courrier et par e-mail » aux députés. « On espère ensuite qu’on pourra les rencontrer », conclut Sandy Olivar Calvo.