Donald Trump a tranché. Hier, le 12 juillet 2025, il a annoncé que les États-Unis imposeront des droits de douane de 30 % sur leurs importations en provenance de l’Union européenne à compter du 1er août. Le locataire de la Maison blanche l’a officialisé dans une lettre diffusée sur sa plateforme Truth Social. Il a justifié sa décision en évoquant un déséquilibre commercial qui, selon lui, existe dans les échanges entre son pays et l’Union européenne.
Un niveau plus élevé que celui envisagé initialement
Donald Trump met ainsi fin au suspense qu’il entretenait depuis plusieurs semaines, alors que des négociations étaient en cours avec la Commission européenne. Début avril, il avait menacé l’Union européenne d’infliger 20 % de droits de douane aux produits européens exportés vers les États-Unis. Fin mai, frustré par le manque d’avancée dans les négociations avec le bloc européen, le chef de l’État américain a relevé ce taux à 50 %, avec effet annoncé au 1er juin, date qu’il avait finalement repoussée.
Et le président américain prend les devants. Donald Trump a prévenu qu’en cas de mesures de rétorsion de l’Union européenne et de l’imposition d’une éventuelle surtaxe sur les biens américains, ce pourcentage de surtaxe serait ajouté aux 30 % annoncés samedi pour les produits européens entrant aux États-Unis. L’Union européenne a réagi en critiquant cette décision tout en se disant toujours prête à continuer à travailler sur un accord.
Selon des sources diplomatiques, les discussions menées jusqu’ici se faisaient sur la base de droits de douane américains de 10 %, avec plusieurs exceptions. Donald Trump laisse toutefois la porte ouverte à une renégociation : « Si vous êtes prêts à ouvrir aux États-Unis votre marché fermé, à éliminer vos droits de douane, vos mesures protectionnistes et les obstacles aux échanges, nous envisagerons, éventuellement, des ajustements » aux droits de douane promis samedi, a-t-il écrit à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
La France appelle l’Union européenne à « défendre résolument les intérêts européens »
Emmanuel Macron a rapidement réagi sur X à l’annonce de Donald Trump. Samedi, le président de la République a fait part de la « très vive désapprobation » de la France et a appelé l’Union européenne à « défendre résolument les intérêts européens ». Il invite notamment la Commission européenne à « accélérer la préparation de contre-mesures crédibles, par la mobilisation de l’ensemble des instruments à sa disposition », « si aucun accord n’était trouvé d’ici le 1er août ».
Avec la Présidente de la Commission européenne, la France partage une très vive désapprobation face à l’annonce de droits de douane horizontaux de 30 % visant les exportations de l’Union européenne vers les États-Unis à compter du 1er août.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) July 12, 2025
Cette annonce survient après des…
Faisant valoir que l’Union européenne négociait avec Washington depuis plusieurs semaines « sur la base d’une offre solide et de bonne foi », le chef de l’État français a affirmé qu’il revenait « plus que jamais à la Commission d’affirmer la détermination de l’Union à défendre résolument les intérêts européens ».
« La France soutient pleinement la Commission européenne dans la négociation qui va s’intensifier, pour parvenir à un accord mutuellement acceptable d’ici le 1er août, afin qu’il reflète le respect que se doivent des partenaires commerciaux comme l’Union européenne et les États-Unis, aux intérêts partagés et aux chaînes de valeur intégrées », a encore écrit le chef de l’État.
Répondant au message du président de la République, le ministre délégué au Commerce extérieur Laurent Saint-Martin a mis sur la table la possibilité d’une « une riposte proportionnée », notamment sur les biens et les services américains, si Bruxelles n’arrive pas à un « accord équitable » avec Washington.
La position française est claire : un accord équitable ou une riposte proportionnée (biens, services, anti-coercition).
— Laurent Saint-Martin (@LaurentSMartin) July 12, 2025
Dès lundi à Bruxelles avec mes 26 homologues 🇪🇺, je serai au travail pour soutenir la Commission dans ses négociations avec les Etats-Unis jusqu’au 1er août. https://t.co/w7ojoWI4St
La Commission européenne souhaite toujours un accord commercial
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a elle aussi critiqué la décision du président américain, précisant que l’Union européenne souhaitait toujours parvenir à un accord commercial avec Washington. « Imposer des droits de douane de 30 % sur les exportations de l’Union européenne perturberait les chaînes d’approvisionnement transatlantiques essentielles, au détriment des entreprises, des consommateurs et des patients des deux côtés de l’Atlantique », a-t-elle prévenu dans un communiqué de presse diffusé le 12 juillet.
A 30% tariff on EU exports would hurt businesses, consumers and patients on both sides of the Atlantic.
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) July 12, 2025
We will continue working towards an agreement by August 1.
At the same time, we are ready to safeguard EU interests on the basis of proportionate countermeasures.
« Nous restons prêts à poursuivre le travail vers un accord d’ici le 1er août, a-t-elle ajouté. Dans le même temps, nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour sauvegarder les intérêts de l’Union européenne, y compris l’adoption de contre-mesures proportionnées si cela s’avère nécessaire. »
Ursula von der Leyen a insisté sur le fait que « peu d’économies dans le monde égalent le niveau d’ouverture de l’Union européenne et son respect des pratiques commerciales équitables. L’Union européenne a constamment privilégié une solution négociée avec les États-Unis, reflétant notre engagement en faveur du dialogue, de la stabilité et d’un partenariat transatlantique constructif. »
La Commission européenne a fait savoir qu’aucune nouvelle réunion n’était, pour l’instant, prévue entre négociateurs américains et européens. Une porte-parole a déclaré que Bruxelles avait été informée de cette décision avant que Donald Trump ne publie les lettres en ligne. Des diplomates ont indiqué qu’une réunion non programmée des ambassadeurs des 27 pays de l’Union européenne avait été convoquée à Bruxelles dimanche après-midi afin de discuter de la dernière initiative de Donald Trump.
Des « conséquences économiques désastreuses […] pour les entreprises agroalimentaires françaises »
L’instauration de ces droits de douane américains de 30 % aurait des « conséquences économiques désastreuses […] pour les entreprises agroalimentaires françaises », a réagi l’Association nationale du secteur (Ania). Cette dernière enjoint les pouvoirs publics français et européen de « protéger l’ensemble de l’agroalimentaire, première industrie de France et d’Europe, et son agriculture dans les négociations en cours avec les États-Unis et dans le cadre de possibles contre-mesures européennes », dans son communiqué.
Les États-Unis sont aussi le premier marché à l’international du secteur des vins et spiritueux, pour un total de 3,8 milliards d’euros en 2024, selon leur fédération (FEVS). « Ce serait une catastrophe pour tout le secteur, dans une situation où les vins et spiritueux affrontent déjà d’énormes difficultés, a lancé samedi Jérôme Despey, de la FNSEA. On a vu souvent des menaces de la part des États-Unis, on demande à la Commission européenne de ne rien relâcher dans la négociation. »
Un coût de 2,3 milliards d’euros pour l’Italie
L’annonce de Donald Trump inquiète également les Italiens. Ces droits de douane de 30 % pourraient coûter jusqu’à 2,3 milliards d’euros aux familles américaines et à l’industrie agroalimentaire italienne, a estimé samedi la principale organisation représentant le secteur agricole en Italie, la Coldiretti.
Selon son communiqué de presse, « l’impact en termes de hausse des prix pour les consommateurs américains aurait inévitablement des répercussions sur les entreprises italiennes […]. La baisse de la consommation se traduit inévitablement par des invendus pour les entreprises italiennes, contraintes de chercher de nouveaux marchés », ajoute-t-elle, soulignant « le danger des contrefaçons, les États-Unis étant le premier producteur mondial de faux aliments + Made in Italy + ».
D’après les projections du syndicat agricole, avec des droits de douane de 30 %, les prix de certains produits italiens emblématiques comme les fromages, les vins, les tomates transformées, les pâtes farcies, les confitures et conserves seraient fortement impactés. Cela « porterait un coup dur à l’économie réelle, aux entreprises agricoles […] mais aussi aux consommateurs américains, qui seraient privés de produits authentiques ou contraints de les payer beaucoup plus cher », a déclaré Ettore Prandini, le président de Coldiretti, cité dans le communiqué.
L’Allemagne appelle Bruxelles au pragmatisme
L’Allemagne est en première ligne des répercussions de l’offensive commerciale américaine car son économie est très dépendante des exportations vers les États-Unis, notamment dans l’industrie chimique, pharmaceutique, automobile, sidérurgique et la fabrication de machines-outils. Ces dernières semaines, le chancelier allemand Friedrich Merz a plaidé pour que l’UE conclue avec Washington un accord « simple », en privilégiant ces secteurs clés, quitte à consentir certaines surtaxes sur d’autres produits.
« L’annonce du président Trump est un signal d’alarme pour l’industrie des deux côtés de l’Atlantique », a asséné dans un communiqué la Fédération allemande de l’industrie (BDI), réagissant à la lettre du dirigeant américain. Cette fédération « appelle le gouvernement allemand, la Commission européenne et l’administration américaine à trouver maintenant très rapidement des solutions dans le cadre d’un dialogue objectif et à éviter une escalade ».
Dans une déclaration transmise par courriel, la ministre allemande de l’Économie Katherina Reichea appelé l’Union européenne à négocier de « manière pragmatique » avec les États-Unis, « une solution […] qui se concentre sur les principaux points de conflit ». « La Commission européenne (chargée des négociations au nom des 27 États membres, N.D.L.R.) a notre soutien dans cette approche. »