Réunie le 8 décembre 2025, la commission du commerce international (Inta) du Parlement européen a adopté, par 27 voix contre 8 et 7 abstentions, une série d’amendements destinés à renforcer les mécanismes de protection des filières agricoles européennes face aux importations sud-américaines.

Ces modifications, qui durcissent sensiblement la proposition initiale de la Commission européenne d’octobre dernier, interviennent dans un contexte de vive opposition du monde agricole à l’accord. L’enjeu : permettre à l’Union européenne de suspendre temporairement les préférences tarifaires accordées aux produits agricoles du Mercosur si ces importations menacent la viabilité des exploitations européennes.

Le texte amendé par la commission Inta doit désormais poursuivre le processus législatif et sera soumis au vote en session plénière au Parlement européen le 16 décembre. S’il est adopté, les eurodéputés devront ensuite ouvrir des négociations avec le Conseil de l’Union européenne, qui avait validé la proposition de la Commission sans modification. Cette stratégie permettait d’éviter la prolongation des discussions interinstitutionnelles et d’assurer l’entrée en vigueur des mesures de sauvegarde avant la signature de l’accord envisagée au Brésil le 20 décembre.

Si ces clauses constituent un argument pour tenter de rassurer les États membres les plus sceptiques, elles n’assurent en rien la ratification de l’accord. Le texte doit d’une part obtenir l’aval des États membres au Conseil de l’Union européenne, lors du prochain sommet les 18 et 19 décembre 2025. Puis obtenir le consentement du Parlement européen, a priori en janvier 2026.

Des seuils d’alerte divisés par deux

L’amendement le plus substantiel voté en commission le 8 décembre concerne l’abaissement des seuils déclenchant l’ouverture d’une enquête de sauvegarde. Là où la Commission proposait qu’une enquête soit lancée lorsque les importations de produits sensibles augmentent de 10 % sur une année, les eurodéputés exigent désormais que ce mécanisme s’enclenche dès une hausse de 5 % calculée sur une moyenne de trois ans.

Les députés souhaitent également que des mesures de protection puissent être activées dès que les prix à l’importation chutent de 5 % par rapport à la moyenne triennale, à condition qu’ils demeurent également inférieurs de 5 % au prix moyen sur le marché intérieur européen. Pour les filières les plus exposées — viande bovine, volaille, sucre — cette révision à la baisse des seuils constitue une exigence maintes fois formulée par les organisations professionnelles agricoles.

La commission Inta a aussi introduit l’obligation pour les pays du Mercosur de respecter les normes de production européennes, via un amendement porté par les eurodéputés Benoît Cassart (Belgique) et Jérémy Decerle (France), tous deux membres du groupe Renew et issus du monde agricole. Concrètement, cette clause de réciprocité impliquerait que les produits importés de l’Argentine, du Brésil, du Paraguay ou de l’Uruguay respectent les mêmes standards de production que ceux imposés aux agriculteurs européens, notamment en matière d’usage de pesticides, d’antibiotiques ou d’hormones de croissance.

Des délais resserrés pour réagir plus vite

Les députés européens ont réduit de moitié la durée des enquêtes préalables à l’activation des sauvegardes : de six à trois mois pour les produits standards, et de quatre à deux mois pour les denrées particulièrement sensibles. Une fois l’enquête déclenchée, la Commission ne disposerait plus que de 14 jours pour réagir, contre 21 jours dans la proposition initiale. La liste des produits couverts par ces dispositifs de protection a par ailleurs été étendue aux agrumes (oranges, citrons, mandarines) et aux œufs.