« À date, une minorité de blocage [contre l’accord avec le Mercosur], nous n’y sommes pas arrivés », a admis la ministre de l’agriculture, Annie Genevard, devant les députés de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale le 9 décembre 2025. Elle répondait à une question de l’élu du Rassemblement national Patrice Martin sur les freins à la constitution d’une telle minorité au sein du Conseil européen, alors qu’un vote final des États membres sur l’accord commercial est attendu à Bruxelles entre le 16 et le 19 décembre prochain.
Empêcher l’accord quand même
« En revanche, nous pouvons essayer d’empêcher d’avoir une majorité d’adoption, et j’espère que cela sera le cas », a poursuivi la ministre, insistant sur les demandes de la France, à savoir « des clauses de sauvegarde robustes, des mesures miroirs dans la réciprocité des normes, et un contrôle accru » des importations. À l’occasion du compte-rendu du conseil des ministres le même jour, la porte-parole du gouvernement a renchéri en ce sens, attendant « des réponses concrètes » de la Commission européenne sur ces trois points.
La ministre raconte avoir « sillonné les capitales de l’Union européenne pour les convaincre de refuser l’accord », sans finalement parvenir à constituer la minorité de blocage nécessaire pour rejeter l’accord lors du vote des États membres. Cette minorité doit représenter a minima 35 % de la population de l’Union européenne pour bloquer le texte. Or le rejet de la France, de la Hongrie, de la Pologne, de l’Autriche et de la Belgique ne suffit pas à atteindre ce quota. Concrètement, miser plutôt sur l’absence d’une majorité qualifiée lors du vote revient à espérer non pas le vote « contre », mais l’abstention de certains États membres.
L’abstention équivaut juridiquement à un vote contre, mais reste moins frontale d’un point de vue politique. Ce mécanisme de blocage passif n’aboutirait cependant que dans le cas où un quota de 15 États membres sur 27, représentant au moins 65 % de la population européenne, n’a pas explicitement voté « pour » le texte.
« Un projet d’accord d’un autre âge »
Dans son audition, Annie Genevard a soutenu que « le Mercosur est un projet d’accord d’un autre âge dans le sens où il n’offre pas toutes les garanties nécessaires de protection de notre agriculture ». Cependant, « l’honnêteté m’oblige à dire que certaines filières y trouveraient leur compte, la filière viticole notamment, ou encore les produits sous signes de qualité qui se verraient protéger de toutes les contrefaçons qui existent aujourd’hui », a-t-elle ajouté.