C’était le 23 avril dernier, la très trumpiste secrétaire à l’Agriculture (USDA) Brooke Collins venait annoncer dans le Dakota du Sud, la libération de 340 millions de dollars aux agriculteurs et communautés rurales touchées par des désastres naturels. Une enveloppe bienvenue mais l’occasion aussi pour elle d’entendre l’inquiétude du secteur agricole qui, au-delà de l’épais dossier des droits de douane, subit les bouleversements au sein de son ministère.

Et bouleversements il y a eu. Dès sa prise de poste à la mi-février, Brooke Collins et son département annonçaient de multiples réductions d’effectif et un plan de coupes radicales dans les dépenses. « Au cours des prochains jours et des prochaines semaines, la secrétaire Rollins aura l’occasion d’examiner des milliers de contrats, de subventions, d’accords de coopération et de dépenses au sein de l’agence afin de s’assurer que chaque dollar est dépensé au mieux pour servir la population, et non l’administration », prévenaient-ils. Quelques semaines plus tard, pas moins de 6 000 employés du ministère avaient été mis à la porte, avant qu’un juge ordonne d’en réengager une partie au début de mars, de façon temporaire. Un simple contretemps, estiment certains.

Des effets sur le terrain

Ces baisses d’effectifs accompagnés de plusieurs fermetures de bureau ne sont pas sans conséquences. Des délais de traitement des dossiers de prêt et de subvention à rallonge ou la mise en place des programmes de développement ralentie qui s’ajoutent aux incertitudes des agriculteurs. « Le gel des dépenses et la prise de décisions radicales sans le contrôle du Congrès ne font qu’ajouter davantage d’incertitude à une économie agricole déjà difficile », s’était rapidement inquiété Rob Larew, président du syndicat agricole NFU devant le sénat en février.

Des défaillances dans la bataille contre la grippe aviaire sont une autre conséquence malheureuse. Au début d'avril, le département de l’Alimentation et des Médicaments (FDA) remerciait par exemple plusieurs milliers d’employés dont des vétérinaires spécialisés, ceux qui avaient notamment découvert que la pasteurisation éliminait le virus présent dans le lait. « Ces licenciements massifs compromettent la capacité de l’USDA à répondre à l’épidémie de grippe aviaire en cours, à traiter les prêts agricoles, les secours en cas de catastrophe et autres aides aux agriculteurs, et à distribuer des subventions et des prêts pour les infrastructures et les services dont dépendent les Américains des zones rurales », se sont alarmés les influents sénateurs démocrates Michael Bennet et Amy Klobuchar.

Tout pour le DOGE

Mais les emplois ne sont pas les seuls visés. Les réductions de budgets sont amorcées dans tous les domaines, notamment ceux avec un marqueur politique important. Outre les programmes alimentaires et l’aide internationale (USAID) qui assurait des achats considérables de denrées agricoles américaines, l’USDA a par exemple annulé le programme pour des productions agricoles favorables au climat et les projets de diminution des émissions de gaz à effet de serre de 3,1 milliards de dollars. « L’initiative a été en grande partie conçue pour promouvoir la nouvelle arnaque verte au profit des ONG, et non des agriculteurs américains », justifiait Brooke Rollins.

Au-dessus de ces décisions très politiques, plane le fameux DOGE, cet organisme supervisé par le milliardaire Elon Musk, qui vise à réduire drastiquement les dépenses et les effectifs de l’État. Une tâche à laquelle la secrétaire à l’Agriculture développe s’emploie. « Nous continuons de réduire massivement le gaspillage à l’USDA. Au cours des trois dernières semaines seulement, nous avons économisé 2,5 milliards de dollars en supprimant 420 subventions inutiles », a-t-elle communiqué sur le réseau X. Le tout, au-dessus d’une photo d’Elon Musk avec une tronçonneuse auquel elle s’adresse. « C’est un honneur pour moi de collaborer avec vous pour redonner la priorité aux agriculteurs américains ! »