L’enquête de l'interprofession laitière (Cniel) auprès des laiteries laisse craindre un nombre record de cessations d’exploitation en production de lait biologique pour l’année à venir. Réunis le13 octobre 2025 à Saint-James (Manche) pour le colloque national de la Confédération paysanne, organisations de producteurs (OP) et laiteries se sont penchées sur les leviers de préservation du potentiel national de production. Déterminants pour la rémunération des éleveurs, les déclassements et les coûts de collecte sont notamment pointés du doigt.
Une collecte laitière en baisse
La collecte de lait bio a reculé de 7 % sur les sept premiers mois de 2025, par rapport à la même période de 2024. Jusqu’alors moins concerné par les baisses, le Grand Ouest affiche une réduction de sa collecte comme le Grand Est, les Hauts-de-France et la Nouvelle-Aquitaine.
En outre, dans le cadre de l’enquête interprofessionnelle réalisées durant l’été 2025, 158 cessations ont été annoncées pour les douze mois à venir. Elles représenteraient 55 millions de litres de lait. C'est 37 % de plus qu'en 2024. Ces chiffres sont associés à une augmentation des déconversions qui représentent 60 % des cessations, malgré la progression du prix du lait bio payé aux producteurs de 3 % en 2025.
Différentiel de prix
La rémunération des producteurs apparait centrale. Président de l’OP Bio Commun anciennement lait bio Seine et Loire, Pierre Moineau résume : « Une ferme bio doit le rester, être collectée et valorisée en bio. » Représentant plus de 500 producteurs des Pays de la Loire, de la Bretagne et de la Normandie, il déplore « un différentiel de prix de 40 euros [avec le lait conventionnel, ndlr] qui représente un risque fort de déconversion puisque les prix de revient sont supérieurs de près de 80 euros par litre ».
Raphaël Cotty, producteur de lait dans le Finistère, regrette également « la dévalorisation du produit et la perte d’attractivité de la bio associées à ce faible différentiel de prix ». Dans ce contexte, Pierre Moineau se réjouit de la valorisation négociée par son organisation de producteurs selon les mécanismes du commerce équitable avec Danone Les 2 Vaches aboutissant à un prix de base de 574 euros les 1000 litres.
Annonçant travailler sur cet enjeu de la rémunération avec Bio Commun, Arnaud Menard de la laiterie Olga (anciennement Vrai) déclare vouloir en outre donner une visibilité d’une grille tarifaire annuelle d’au moins un an aux producteurs. Le responsable des filières et relations agricole de l’entreprise laitière se réjouit ainsi de l’arrivée des premiers yaourts estampillés du label local et agroécologique Terres de Sources (1) sur les tables des restaurants scolaires de la métropole de Rennes.
Maud Cloarec, vice-présidente de Biolait, pointe un autre défi : « Notre volonté de collecter partout représente un coût de 50 € les 1 000 litres lequel impacte le prix payé à nos producteurs. Le maintien d’une production dans toutes les régions ne peut pas dépendre que de nous, il nécessite un investissement public. »
(1) Label créé par Eau du Bassin rennais encourageant les bonnes pratiques locales pour l’environnement et la protection de l’eau potable.