À cinq jours de la fin des négociations commerciales entre la grande distribution et les industriels, Michel-Édouard Leclerc, président du comité stratégique des centres E. Leclerc, a dénoncé les hausses réclamées par les industriels.

Ces hausses « ne sont absolument pas justifiées », a-t-il déploré au micro de BFMTV, ce jeudi 23 février 2023. « Si elles sont justifiées, ils n’arrivent pas à nous donner les justifications, ils n’arrivent pas à argumenter. »

« Des augmentations énormes »

« Sur le sucre, il y a déjà eu une hausse de 22 % l’année dernière. Aujourd’hui, on nous demande 53,82 % en plus de l’année dernière », a d’abord détaillé Michel-Édouard Leclerc.

Il a ensuite donné d’autres exemples de hausses demandées par les industriels : +29 % sur les farines, +23,55 % sur le riz, +17 % sur le thé, presque 21 % sur les nourritures pour animaux (oscillant entre 17 et 39 % ,selon les fournisseurs), +20,59 % sur les conserves de fruits, +20,37 % sur les condiments et +17,10 % sur les conserves de légumes.

Pour le patron des centres E. Leclerc, « ce sont des augmentations énormes » qui sont réclamées par les industriels. « Je médiatise ces chiffres pour dire aux fournisseurs, quand vous dites dans les médias que vos hausses sont raisonnables, moi, je réponds que les hausses ne sont pas raisonnables », a-t-il souligné.

Si le président de l’Ania(Association nationale des industries alimentaires), Jean Philippe André, a annoncé demander en moyenne 8 à 10 % de hausse aux distributeurs, pour Michel-Édouard Leclerc « c’est faux », brandissant les chiffres énoncés.

Au vu des tarifs demandés par les industriels dans le cadre des négociations commerciales, Michel-Édouard Leclerc a estimé que « ce n’est pas mars qui va être rouge, mais le deuxième trimestre », avec des hausses « aux alentours de 12, 13, 14 % ».

« Concrètement, cela veut dire que les consommateurs vont encore voir beaucoup de hausses », a-t-il souligné avant de préciser que les distributeurs allaient lisser ces hausses jusqu’à l’été prochain.

Les distributeurs veulent mettre fin aux débats parlementaires

Les distributeurs sont également perplexes face à l’ambiguïté du discours des pouvoirs publics sur l’inflation. Si Michel-Édouard Leclerc admet volontiers que le gouvernement est à l’écoute des propositions de la grande distribution pour faire baisser les prix, il ne comprend pas les débats parallèles qui se jouent actuellement au Parlement.

Le gouvernement « nous a demandés, dans nos négociations avec les industriels, d’être « plus cool » avec les agriculteurs et les PME », a expliqué le dirigeant des enseignes E. Leclerc, qui déplore que « dans le même temps, le gouvernement s’en mêle ».

Aussi, la grande distribution souhaite maintenant que le gouvernement mette un terme à ce débat parlementaire qui leur demanderait de limiter les promotions à 34 %.

Pour Michel-Édouard Leclerc, les discussions visent à étendre au secteur de l’industrie multinationale des lois de protection qui étaient faites pour les agriculteurs.

Seul un industriel sur deux a signé tous ses contrats

De son côté, l’Ania a indiqué mercredi 22 février à l’AFP que seul un industriel sur deux a signé tous ses contrats avec ses clients distributeurs. Pour la principale organisation de l’industrie agroalimentaire, il s’agit d’un taux inhabituellement bas.

À une semaine de la clôture de négociations commerciales particulièrement tendues en raison de la forte inflation de nombreux coûts de production, le taux de signatures s’élevait ainsi à 54 %, contre 80 % en général, selon une porte-parole de l’Ania. « Nous sommes un peu inquiets chaque année, mais c’est rare que tant d’entreprises n’aient pas signé aussi tard », a-t-elle ajouté.

Une fois que les contrats auront été signés, les nouveaux tarifs seront progressivement répercutés dans les rayons des supermarchés. Certains acteurs craignent un « mars rouge » en termes de hausses de prix, ce que réfute le ministre de l’Économie Bruno Le Maire.

Sur le sujet des négociations commerciales, « S’il y a une inquiétude à avoir cette année, c’est sur un certain nombre d’industries agroalimentaires », a de son côté estimé mercredi le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau.

Il a précisé que le gouvernement travaillait à un plan de soutien à l’industrie agroalimentaire, certaines entreprises ayant fortement puisé dans leur trésorerie en 2022 et n’étant, selon lui, pas capables de faire de même en 2023.