S’il y a bien un choix sur lesquels ils ne reviendraient pas, c’est l’achat collectif de leurs taureaux limousins. « Le premier remonte à juin 2004 », se souvient Lucien Lemesle, éleveur retraité de l’EARL Lemesle, situé à Erdre-en-Anjou. Avec Claude Cesbron, prédécesseur de l’EARL Blaiteau, basé à une soixantaine de kilomètres à Vezins, une belle entente s’installe. Les deux exploitants, aussi sélectionneurs, ont décidé de mutualiser leurs moyens pour prétendre à une génétique meilleure. « Les achats de reproducteurs en copropriété supposent une confiance partagée », évoquent-ils en chœur. Hugues Lemesle et Jérémy Blaiteau, qui ont chacun repris les rênes des deux systèmes naisseurs engraisseurs, ont poursuivi dans la même logique. Ils ont ensuite été rejoints par Frédéric et Pascal Pungeot, du Gaec de la Martinière, en 2015. Tous acheteurs et apporteurs réguliers à la station de qualification de Lanaud, en Haute-Vienne, ils souhaitaient pouvoir miser sur les meilleurs reproducteurs lors des enchères, avec un budget raisonnable. « En dix-huit ans, nous avons acheté trente-six taureaux en commun, dont vingt et un provenant de Lanaud », retrace Hugues Lemesle.
Statut sanitaire équivalent
Pour eux, le premier critère de réussite consiste à disposer des mêmes garanties sanitaires. « Il faut faire preuve de transparence et se prévenir les uns les autres en cas de pépin », poursuit-il. Prophylaxie annuelle et surveillance accrue sont de rigueur. « Mis à part les taureaux, les achats extérieurs sont exceptionnels. Le cas échéant, des analyses sanguines sont réalisées systématiquement et les nouveaux pensionnaires sont placés en quarantaine », ajoute Hugues.
Pour davantage de sécurité, seuls les véhicules propres à chaque élevage sont utilisés pour déplacer les animaux. Une attention particulière est portée à la gestion au pâturage, pour éviter tout mélange des lots. « Le fait de bénéficier d’un statut sanitaire équivalent nous permet de faire transiter un taureau d’une ferme à l’autre, sans phase d’isolement. Il est prêt à saillir le jour même », relèvent Frédéric et Pascal.
La reproduction est réalisée uniquement en monte naturelle. Les trois systèmes conduisent leurs troupeaux limousins en double période de vêlage. Selon les saisons, deux à trois taureaux sont répartis sur chaque site. Ces derniers restent deux à trois mois en compagnie d’un lot de 15 à 25 femelles, avant de transiter chez un autre copropriétaire.
Retour sur investissement
Le Gaec de la Martinière, l’EARL Lemesle et l’EARL Blaiteau sont présents à chaque vente organisée par la station de Lanaud. Ils se mettent d’accord en amont sur une fourchette de prix à l'achat, et partagent les frais à parts égales. « Nous adaptons le montant en fonction de la qualité des candidats et de leur pedigree », rapporte Jérémy Blaiteau. Les éleveurs recherchent de façon générale un profil d’indexation complet ainsi qu’une bonne morphologie. « Pour s’assurer de leur qualité, les taureaux effectuent toujours une campagne de reproduction dans chacun des trois élevages, avant que nous les proposions à la vente », assure Jérémy. Les achats collectifs offrent la possibilité aux exploitants de miser sur une gamme de reproducteurs plus larges, et ainsi gagner en variabilité génétique. « L’acquisition de veaux élites à Lanaud a des retombées positives, aussi bien sur le volet génétique que promotionnel », souligne Frédéric. Nous partageons également les risques d’investissement, lorsque des factures vétérinaires onéreuses tombent par exemple.
Lucie Pouchard