Pour l’agriculture, la compensation écologique tourne souvent à la double peine : aux hectares engloutis sous un aménagement s’ajoutent ceux mobilisés pour mettre en place les mesures compensatoires, pas toujours compatibles avec la production agricole. Avec l’apparition de phénomènes spéculatifs, c’est même une triple peine qu’elle subit. Car des maîtres d’ouvrage qui n’ont pas anticipé leur obligation de compensation et connaissent mal le marché sont prêts à acquérir des terres au prix fort pour mettre en place les mesures compensatoires, déstabilisant le marché foncier.
Une forte pression en Île-de-France
Dans l’Île-de-France, où les grands projets d’aménagement entraînent une forte pression sur le foncier, la Safer et le bureau d’études Biotope (leader de l’ingénierie écologique) ont décidé d’associer leurs compétences au service d’une compensation écologique intelligente. « Nous lançons aujourd’hui Archipel, une solution apportée aux maîtres d’ouvrage public et privés pour s’acquitter de leur obligation de compensation écologique, présente Claire Poinsot, de Biotope. La compensation écologique va dans le mur si elle n’intègre pas les acteurs des territoires. Sanctuariser du foncier en l’isolant de tout ce qui se passe autour ne rend pas forcément service à la nature, d’autant que l’écologie n’est pas incompatible avec l’activité agricole… »
Le rôle d’Archipel sera d’identifier du foncier pouvant se prêter à la compensation et d’accompagner le maître d’ouvrage dans la mise en œuvre de mesures compensatoires cohérentes avec les enjeux écologiques et économiques du territoire. « L’Ile-de-France perd environ 2 000 ha par an par l’urbanisation : nous voulons absolument éviter d’y rajouter une perte due à la compensation écologique, qui se mesure en centaines d’hectares dans la région », insiste Jean-Baptiste Schweiger, de la Safer Île-de-France.
Épargner les espaces agricoles
Pour éviter de toucher aux espaces agricoles productifs, la compensation peut se faire sur des espaces en déshérence, des sites naturels ou boisés dégradés… « On peut même envisager des mesures de réhabilitation de friches qui permettraient de rendre des terres à l’agriculture, évoque Jean-Baptiste Schweiger. Ou encore des mesures visant à améliorer le fonctionnement d’un réseau hydrographique, qui bénéficierait à la fois au milieu naturel et à l’agriculture. La compensation écologique ne doit pas être un Ovni dans le monde rural ! »