Pour valoriser le digestat issu de la méthanisation agricole, plusieurs filières sont envisageables. Avec son potentiel de fertilisation et d’amendement pour les sols, il est épandu sur les prairies et les cultures. Il est également possible de le normaliser ou de l’homologuer en vue de le mettre sur le marché, à destination par exemple de collectivités ou de particuliers. « Le digestat a de la valeur ! », rappelle Sophie Benchimol, conseillère énergie à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire, par ailleurs ingénieure en procédés et énergies renouvelables.

Un plan d’épandage classique

Suivant les intrants utilisés, sa nature et son utilisation diffèrent. « Si le méthaniseur recourt à du fumier et des végétaux fibreux, le digestat sera plutôt sec, plutôt amendant. Il ressemble à un compost ou une fumure de fond. Au contraire, le digestat issu de lisier pur, va être plus liquide, donc fertilisant et son emploi va ressembler à celui d’un engrais minéral de type ammonitrate. »

 « Quand c’est bien fait, le digestat est adapté à tous les types de sol », précise Sophie Benchimol. Cela va dépendre de la typologie de culture implantée. Il existe des doses réglementaires définies par type de culture et des périodes de passage. « Ces paramètres reprennent ceux d’un plan d’épandage classique avec des effluents d’élevage. »

Comment choisir entre le digestat brut et la séparation de phase ??

L’utilisation de l’un ou de l’autre va dépendre de la taille de l’unité de méthanisation et des pratiques antérieures des porteurs de projet. « Les agriculteurs qui ont eu l’habitude de travailler en épandage de lisier peuvent se sentir confortables avec un digestat brut, alors que d’autres familiers des coproduits ou souhaitant ouvrir encore plus les voies de valorisation agronomique vont plutôt se tourner vers la séparation de phase », note Sophie Benchimol.

Le digestat brut a l’avantage de la simplicité. C’est un produit organique qui contient à la fois la fertilisation et l’amendement. En revanche, il est plus contraignant en termes de volume de stockage et de période d’épandage. Et comme il peut être pâteux, il peut être difficile de le passer dans les tonnes à lisier.

La séparation de phase aboutit à 2 produits aux caractéristiques très différentes. D’un côté un liquide fertilisant riche en azote ammoniacal, de l’autre un solide (25 % de matière sèche) riche en carbone stable avec un potentiel amendant. Elle permet d’optimiser les ouvrages de stockage, les techniques d’épandage et d’apporter de la fertilisation et de l’amendement de précision au bon moment pour la culture qui en a besoin.

Quatre points de vigilance

Suivant les typologies d’intrants, les exploitants agricoles sont confrontés à des contraintes plus ou moins fortes en matière de digestats. Par exemple, certains produits d’origine industrielle ne sont pas conformes aux exigences des cahiers des charges. Les agriculteurs doivent ainsi être vigilants à utiliser un digestat conforme aux cahiers des charges de leurs débouchés.

Les digestats issus de boues de station d’épuration font l’objet d’une réglementation particulière distincte de celle qui concerne les digestats purement agricoles issus d’effluents d’élevage, de végétaux, de résidus de culture.

Il convient aussi d’être très attentif en termes de volatilisation de l’azote. La réglementation a été renforcée. Le digestat contient davantage d’ammoniaque directement utilisable par les plantes que les effluents d’élevage par exemple. La contrepartie est qu’il est beaucoup plus volatil, et qu’il peut émettre de l’ammoniac dans l’atmosphère. Il est donc obligatoire de couvrir toutes les fosses de stockage de digestat et de l’épandre idéalement avec des enfouisseurs, en tenant compte de la météo.

Le matériel doit être de qualité et nettoyé régulièrement. La méthanisation peut être l’occasion de mutualiser ces coûts de matériel d’épandage.

« Les voix de la métha, par ceux qui font le biométhane », une série réalisée par la France Agricole Factory et proposée par GRDF (21/10/2022)